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Quand le job de vos rêves n’en est pas un

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Nous vous aidons volontiers pour les questions juridiques, notamment celles concernant le droit du travail. En tant que membre, vous profitez d’un conseil gratuit. Si notre assurance de protection juridique accorde une garantie de paiement, la représentation par un avocat dans des cas relevant du droit du travail est également gratuite pour nos membres actifs.

Vous êtes conseillé par les juristes de nos sections. Lorsque vous prenez contact, nous vous recommandons de tenir votre numéro de membre à portée de main et de contacter directement le conseil juridique des sections.

En cas de plainte contre des membres de l’asmac pour non-respect du code de déontologie médicale, c’est l’instance de conciliation qui est responsable. En cas de plainte pour comportement contraire à la déontologie, c’est la commission de déontologie qui est compétente.

Eric Vultier, lic.iur., avocat
Auf der Mauer 2
8001 Zurich
Tél. +41 44 250 43 23
E-mail

Claudia von Wartburg, avocate
Hauptstrasse 104
4102 Binningen
Tél. +41 61 421 05 95
E-mail

Janine Junker, avocate
Schwarztorstrasse 7
3007 Berne
Tél. +41 31 381 39 39
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​Simon Schneider, avocat
Schwarztorstrasse 7
3007 Berne
Tél. +41 31 381 39 39
E-mail

Pierre Mauron, avocat
Rue de la Léchère 10
Case postale 519
1630 Bulle
Tél. +41 26 919 07 07
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Christian Bruchez, avocat
Waeber Membrez Bruchez Mangué Avocats
12, rue Verdaine
Case postale 3647
1211 Genève 3
Tél. +41 22 312 35 55
E-mail

Samuel B. Nadig, lic.iur., avocat
Hauptstrasse 40
Case postale 86
8215 Hallau
Tél. +41 52 682 00 10

et

Voia da Rofna 5
7083 Lantsch/Lenz
Tél. +41 81 356 23 60
E-mail

Patrick Mangold, avocat
Avenue d’Ouchy 66
Case postale 
1001 Lausanne
Tél. +41 79 414 83 64
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Lorenza Pedrazzini Ghisla, avocate
Via Luini 12
Casella postale 22
6601 Locarno
Tél. +41 91 911 95 92
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Eric Vultier, lic.iur., avocat
Auf der Mauer 2
8001 Zurich
Tél. +41 44 250 43 23
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Patrick Mangold, avocat
Avenue d’Ouchy 66
Case postale 
1001 Lausanne
Tél. +41 79 414 83 64
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Valentine Gétaz Kunz, avocate
Ruelle du Temple 4
Case postale 20
1096 Cully
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Eric Vultier, lic.iur., avocat
Auf der Mauer 2
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Tél. +41 44 250 43 23
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Susanne Hasse, avocate
VSAO Zürich
Rämistrasse 46
8001 Zurich
Tél. +41 44 941 46 78
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Questions et réponses

Vous souhaitez en savoir plus sur des problèmes concrets et les solutions correspondantes? Alors lisez la suite!

Le contrat de travail prévoit une prohibition de faire concurrence. Celle-ci m’interdit de a) débaucher des patients pendant mon engagement et b) d’ouvrir au terme de mon engagement un cabinet dans un rayon de 20 kilomètres de l’ancien cabinet. En cas de violation, je devrais m’acquitter d’une pénalité de CHF 30 000.–. Cela équivaut à mon avis à une interdiction d’exercer la profession. Dois-je le signer?

Prohibition de faire concurrence:

a) pendant l’engagement
Si vous débauchez des patients pendant votre engagement, vous violez clairement votre devoir de loyauté. Cela peut être sanctionné par une peine conventionnelle au sens d’une mesure disciplinaire. La peine doit cependant être proportionnée et ne peut pas remplacer un éventuel dommage subi par le débauchage. La question de savoir si dans votre cas, la peine conventionnelle de CHF 30 000.– est proportionnée dépend notamment de votre salaire. Je vous recommande cependant de faire supprimer une telle clause, vu qu’elle implique des risques considérables pour vous, étant donné qu’en cas de procès, vous devriez prouver que vous n’avez pas débauché un patient venu nouvellement vous consulter.

b) prohibition de faire concurrence après expiration du contrat
Il est possible de convenir dans certaines limites d’une prohibition de faire concurrence aussi pour la période qui suit la fin des rapports de travail. La prohibition de faire concurrence doit être inscrite dans le contrat de travail. Cette clause doit s’exprimer sur la durée, la zone géographique et l’objet. Normalement, on prévoit une durée de six mois. La durée maximale de trois ans ne sera admissible que dans des circonstances particulières. L’activité interdite peut s’étendre dans la mesure où elle touche les relations d’affaires intenses de l’ancien employeur et le domaine d’activité de l’employé (dans le cas présent, la zone d’attraction du cabinet sera déterminante). De plus, il faut préciser à quelle activité la prohibition de faire concurrence se réfère. Par exemple à un cabinet de cardiologie ou de gynécologie. Si la prohibition de faire concurrence est excessive, le juge peut la réduire à la mesure admise.

Il n’existe en principe pas de profession dans laquelle une prohibition de faire concurrence générale est illégale. Or, la profession médicale est une profession libérale. C’est pourquoi une prohibition de faire concurrence n’est pas admissible selon la doctrine et la jurisprudence actuelles. Ce sont cependant les circonstances concrètes des rapports de travail qui sont déterminantes. Dans la jurisprudence, on part du principe que les patients entretiennent une relation de confiance particulière avec leur médecin et qu’un médecin ne peut donc pas tomber sous la prohibition de faire concurrence. Afin d’éviter tous malentendus, je vous recommande de faire supprimer la clause de prohibition de concurrence avant de signer le contrat.

Claudia von Wartburg, avocate et directrice de la section asmac des deux Bâle, «Journal asmac» 3/2021

 

L’hôpital C m’a proposé un poste de médecin-assistante. J’ai donné mon accord oralement. Entre-temps, j’ai reçu une meilleure proposition qui m’offrirait davantage de possibilités de formation postgraduée et un salaire plus élevé. J’aimerais donc opter pour cette deuxième offre d’emploi. Puis-je retirer mon accord oral? De quoi dois-je tenir compte?

En donnant votre accord oral, vous avez conclu un contrat de travail valable, pour autant que vous ayez pu vous mettre d’accord avec l’employeur sur les points essentiels du contrat. Les éléments d’un contrat de travail sont: mise à disposition du temps de travail, intégration dans une organisation de travail étrangère et droit au salaire. Si vous avez trouvé un accord sur ces points, un contrat de travail valable a été établi. La forme écrite n’est pas requise.

Vous ne pouvez pas simplement vous retirer d’un contrat de travail valable. Le principe «pacta sunt servanda» (les contrats doivent être respectés) s’applique. Le contrat de travail peut être dénoncé par la résiliation d’une des parties ou d’un commun accord.

En cas de résiliation, les délais de congé légaux ou convenus s’appliquent. Si vous communiquez votre résiliation à l’employeur avant votre entrée en service, celle-ci prend effet à compter du premier jour de travail convenu. Généralement, les contrats prévoient un temps d’essai avec des délais de congé plus courts. D’après le Code des obligations (CO), le premier mois d’un rapport de travail est considéré comme temps d’essai durant lequel s’applique un délai de congé de sept jours. Des dispositions différentes peuvent être prévues. Le temps d’essai peut aussi être supprimé. Dans ce cas les délais de résiliation ordinaires s’appliquent. Durant la première année de service, le délai de congé est d’un mois. Des dispositions différentes sont possibles.

L’employé a l’obligation de fournir la prestation de travail pendant ce délai de congé. Comme il n’est généralement pas dans l’intérêt de l’employeur que les rapports de travail se terminent déjà peu après la prise de fonction, l’employeur approuvera le plus souvent de mettre fin aux rapports de travail d’un commun accord. Si cette résiliation d’un commun accord s’effectue avant la prise de fonction, l’employé est libéré de l’obligation de prendre ses fonctions.

Si l’employeur n’est toutefois pas d’accord de résilier le contrat de travail valable et qu’il maintient son exécution, vous devrez prendre vos fonctions. Si vous ne le faites pas, par exemple parce que vous avez déjà commencé à travailler ailleurs, cela sera considéré comme une résiliation immédiate sans justes motifs par l’employé. Une meilleure offre d’emploi n’est alors pas considérée comme un juste motif qui légitimerait la non-entrée en service. Cela a pour conséquence que vous êtes redevable de dommages-intérêts. L’employeur peut demander par voie d’action en justice ou de poursuites dans les 30 jours à compter de la non-entrée en place une indemnité égale au quart du salaire mensuel. Il a en outre droit à la réparation du dommage supplémentaire.

Pour résumer, vous devez immédiatement informer l’employeur de vos intentions. De préférence par écrit. Il est donc recommandé de négocier une résiliation du contrat d’un commun accord.

Si vous avez des questions ou des doutes sur la question de savoir si un contrat de travail valable a été conclu, n’hésitez pas à vous mettre en rapport avec votre section ASMAC. Vous éviterez ainsi des inconvénients et conséquences financières considérables.

Samuel Nadig, juriste et directeur de la section asmac Grisons, «Journal asmac» 1/2018

Conventions collectives de travail (ci-après CCT) et loi sur le travail

Il existe souvent une confusion entre la portée d’une CCT et celle des dispositions de la loi sur le travail et ses ordonnances d’application, si bien qu’il vaut la peine de les définir et d’expliquer leurs différences principales.

  1. Convention collective de travail (CCT)
    La CCT est un contrat passé entre une ou plusieurs associations d’employeurs et/ou un ou plusieurs employeurs d’une part, et une ou plusieurs associations de travailleuses et travailleurs, d’autre part, afin de régler leurs relations et de réglementer les contrats de travail individuels conclus par leurs membres (ou par eux­mêmes s’agissant d’employeurs individuels). Les CCT aménagent les rapports de travail en tenant compte des spécificités des branches et des métiers. Elles accordent généralement aussi aux travailleuses et travailleurs des droits supplémentaires par rapport à ceux découlant du Code des obligations, notamment en prévoyant des salaires minimaux et en limitant la durée du travail. Le champ d’application d’une CCT est limité et précisé dans la CCT elle­même. A titre d’exemple, il se peut qu’une CCT ne s’applique qu’aux médecins assistant(e)s et chef(fe)s de clinique. En sont donc exclus de fait les autres corps de métiers.
  2. Loi sur le travail et ordonnances d’application
    La loi sur le travail (LTr), qui fait partie du droit public fédéral, a pour objectif de protéger la santé de la travailleuse et du travailleur de tout préjudice imputable au poste de travail. Ses prescriptions s’articulent autour de deux axes: celui de la protection de la santé au sens large et celui des durées du travail et du repos. Elle constitue ainsi le fondement de la protection des travailleuses et travailleurs en Suisse. En principe, la loi sur le travail est applicable à toutes les entreprises privées, à l’exclusion des administrations publiques. Il existe toutefois un certain nombre d’exceptions. Les médecins en formation sont soumis(e)s aux règles de la LTr depuis 2005, et ceci y compris celles et ceux travaillant dans les hôpitaux publics.

La LTr est complétée par cinq ordonnances, dont les OLT 1 et 2, qui contiennent en particulier des règles spécifiques aux médecins en formation et au contexte hospitalier.

Les dispositions de la loi sur le travail et de ses ordonnances sont de droit impératif. Cela signifie qu’il n’est pas possible d’y déroger en défaveur des employé(e)s, même avec l’accord des parties au contrat ou à la CCT. Si un accord dérogatoire est conclu, il n’a ainsi juridiquement aucune valeur et personne ne pourra s’en prévaloir en cas de litige.

  1. Situation dans le contexte des hôpitaux pour ce qui est des médecins en formation
    Une CCT pouvant comporter un rappel des règles de la loi sur le travail, il y a lieu de faire la distinction entre ce qui est du pur rappel des règles fédérales et ce qui est entre les mains des partenaires sociaux et qui peut faire l’objet de discussions/négociations. A titre d’exemples, on citera:

Règles impératives de la loi sur le travail

  • Protection des femmes enceintes et des mères qui allaitent
  • Travail supplémentaire (au­delà de 50 heures)
  • Durée du repos
  • Nombre de dimanches de congé par mois
  • Définition du service de piquet

Règles qui peuvent faire l’objet de discussions

  • Salaire
  • Durée du travail, en deçà de 50 heures
  • Paiement de la formation
  • Définition des fonctions

Avoir connaissance et conscience de ces différences est essentiel pour éviter les débats stériles sur des problématiques pour lesquelles l’asmac n’a aucune prise.

Patrick Mangold, juriste des sections asmac Jura et Vaud, «Journal asmac» 3/2022

 

Contrats de travail à temps partiel: risque de discrimination indirecte des hommes et des femmes

La loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes interdit toute discrimination (cf. art. 3 LEg), en particulier dans les rapports de travail.

Cela ne concerne pas seulement la discrimination directe (qui ressort déjà d’une simple comparaison), mais aussi la discrimination «indirecte», c’est-à-dire les circonstances défavorables dans lesquelles les hommes et les femmes sont apparemment traités sur un pied d’égalité, mais où les femmes sont nettement plus souvent exposées à une discrimination.

Nous constatons cette discrimination indirecte par exemple dans les contrats de travail incluant une adaptation salariale annuelle en fonction des années de service lorsque la collaboratrice concernée se voit proposer un engagement à temps partiel. Souvent, les adaptations ne s’effectuent pas sur une base annuelle, sur la base du temps de travail accompli en pourcent, mais sur la base du nombre d’années de service accomplies, c’est-à-dire que dans le cas d’une personne employée à mi-temps (50 pourcent), cette adaptation n’est appliquée (que) tous les deux ans. Les conséquences sont manifestes et entraînent des répercussions économiques importantes.

La pratique qui n’est souvent pas clairement réglée dans les contrats de travail semble développer sa propre logique. Les adaptations annuelles récompensent l’expérience professionnelle acquise. La personne employée à mi-temps doit donc travailler deux fois plus longtemps pour acquérir la même expérience que celle employée à plein temps.

Il s’avère cependant, compte tenu de cette pratique, qu’une éventuelle augmentation de salaire est moins probable, et cela sans qu’il soit prouvé que l’engagement à temps partiel s’accompagne d’une expérience professionnelle inférieure. De plus, il est évident que cet inconvénient touche principalement les femmes qui travaillent plus souvent à temps partiel (principalement pour des raisons familiales).

Le Tribunal fédéral s’est aussi penché sur cette question et a constaté qu’il s’agissait d’une discrimination indirecte lorsque l’application de règles formellement neutres conduisait dans les faits, sans motifs valables, à des résultats nettement plus négatifs pour les membres d’un sexe comparativement à ceux de l’autre. D’après la Cour suprême, c’est en particulier le cas lorsque l’on accorde une importance particulière aux années de service ou à l’expérience professionnelle, ce qui entraîne une discrimination des femmes qui ralentissent ou interrompent plus facilement leur carrière professionnelle pour se consacrer à l’éducation des enfants (cf. ATF 142 II 49, consid. 6.1; ATF 124 II 409, consid. 9d).

La déléguée du Conseil d’Etat tessinois a confirmé en avril 2021, dans un cas concret, en référence à l’arrêt du TF susmentionné, qu’il s’agissait d’une discrimination indirecte pour les employés à temps partiel d’un hôpital lorsque le calcul de l’adaptation des salaires tenait trop fortement compte  du taux d’occupation.

Lorenza Pedrazzini Ghisla et Luigi Pedrazzini, avocats de la section asmac Tessin, «Journal asmac» 2/2022

Je travaille depuis environ six mois à l’hôpital, à raison de 50 heures par semaine. Je saisis régulièrement mes heures (heure d’arrivée, heure de départ et pauses) dans le logiciel mis à ma disposition par l’hôpital. Le mois dernier, j’ai réalisé 30 heures supplémentaires. Toutefois, après le bouclement, je me suis aperçu que seules dix heures avaient été comptabilisées pour ce mois et que mon solde d’heures supplémentaires n’était «que» de 70 heures (au lieu de 90). Je n’ai pas été informé par mes supérieurs de cette réduction. C’est uniquement en comparant le décompte que j’avais rempli avec celui que j’ai reçu après le bouclement que j’ai constaté que des heures avaient disparu.

Lorsque les circonstances l’exigent, le travailleur est tenu d’exécuter des heures supplémentaires dans l’intérêt de l’employeur. Il doit notamment le faire lorsque son employeur le lui demande. Des heures supplémentaires peuvent également être accomplies à l’initiative du travailleur, c’est-à-dire sans que l’employeur ne le demande expressément. Dans ce cas, si l’employeur sait que des heures supplémentaires sont réalisées et qu’il ne s’y oppose pas, le travailleur peut partir du principe que son employeur les approuve comme s’il les avait lui-même ordonnées. Peu importe alors de savoir si ces heures sont ou non nécessaires. En revanche, si l’employeur n’est pas au courant que des heures supplémentaires sont réalisées, le travailleur doit l’annoncer sans retard pour que l’employeur puisse prendre les mesures organisationnelles afin d’éviter que de nouvelles heures supplémentaires soient réalisées à l’avenir, ou pour les approuver. A défaut d’annonce, les heures ne pourront pas être prises en compte. Lorsque l’employeur conteste les heures annoncées, il faudra se demander si elles étaient nécessaires, c’est-à-dire indispensables à la bonne marche de l’entreprise ou accomplies dans son intérêt manifeste.

Sachez encore qu’en cas de litige, il appartient au travailleur de démontrer que les heures effectuées remplissent ces conditions, tout comme il devra prouver le nombre d’heures réalisées.

Mais alors, qu’en est-il de mes heures?  

Dans votre cas, il s’agit de savoir si l’hôpital s’est opposé aux heures que vous avez effectuées. En effet, dans la mesure où vous enregistrez régulièrement vos heures de travail dans le logiciel mis à votre disposition, l’hôpital ne pouvait pas ignorer que vous réalisiez des heures supplémentaires. La question est donc de savoir si vos heures ont été approuvées et, si tel n’a pas été le cas, si elles étaient nécessaires.

Il faut faire une distinction entre les heures réalisées durant les six premiers mois et celles effectuées le mois passé. Durant vos six premiers mois d’activité, vous pouviez de bonne foi considérer que l’hôpital approuvait vos heures compte tenu de son absence de réaction. Vos heures devront donc être compensées, en temps ou en argent, indépendamment de la question de savoir si elles étaient nécessaires.

En revanche, pour les heures réalisées le mois passé, vous ne pouvez plus de bonne foi partir du principe que l’hôpital les approuve puisque vous avez constaté que vos heures supplémentaires n’avaient pas toutes été comptabilisées lors du bouclement (10 heures approuvées au lieu de 30). Cela dit, d’un autre côté, s’il estimait que les autres 20 heures n’étaient pas nécessaires, l’hôpital aurait dû s’y opposer fermement. Et s’il voulait éviter que de nouvelles heures soient réalisées, il aurait dû prendre les mesures organisationnelles. Or, vos supérieurs ne vous ont rien dit directement et vous devez toujours effectuer autant d’heures supplémentaires. Par conséquent, pour clarifier la situation, je vous conseille d’en parler directement avec votre hiérarchie et avec les ressources humaines.

Mais, pour les six premiers mois, je n’ai pas gardé copie de chacun des décomptes que j’ai envoyés. Je ne sais donc plus combien d’heures j’ai réalisées ni si l’hôpital en a supprimées.

Comme il existe un système informatisé d’enregistrement des heures, vous pouvez demander la production des décomptes. Le logiciel doit conserver la trace de chaque saisie et de chaque modification. Vous pourrez donc comparer les décomptes avant et après validation. Comme indiqué avant, c’est votre décompte d’heures qui devra être retenu (et pas seulement les 60 heures décomptées par l’hôpital durant les six premiers mois).

En résumé, quels que soient les cas de figure, il peut s’avérer très utile d’effectuer des printscreens ou des photos de vos décomptes d’heures avant leur envoi en vue du bouclement. Et si vous remarquez des différences entre les décomptes, parlez-en directement avec vos supérieurs et avec les ressources humaines.

Joël Vuilleumier, avocat et juriste de la section asmac Neuchâtel, «Journal asmac» 6/2022

 

Les hôpitaux ayant dû repousser les interventions électives pendant une certaine période pour garantir des capacités suffisantes pour les patientes et patients atteints du COVID-19, un grand nombre de médecins ont accumulé des heures négatives. Est-il correct de conserver ces soldes d’heures négatives dans le système et de le justifier par l’argument que les soldes d’heures négatives n’ont pas de répercussions sur la planification des services et ne seront pas pris en compte à la fin des rapports de travail?

Non. Car un tel système signifie que chaque heure supplémentaire nouvellement effectuée est considérée comme compensée par une heure négative. C’est-à-dire qu’un surcroît de travail ne serait pas compensé par un congé. Cela signifie aussi que le risque de ne pas pouvoir fournir la prestation de travail pendant la pandémie de coronavirus est répercuté sur les collaboratrices et collaborateurs, alors qu’il faut pourtant reconnaître qu’il s’agit là d’un cas de demeure de l’employeur (art. 324 CO). On reconnaît un tel cas si les collaborateurs offrent leur prestation de travail, mais que cette offre n’est pas acceptée par l’employeur, et que l’on ne peut donc tout simplement pas travailler. 

L’employeur peut évidemment avancer qu’il n’est pas responsable du cas de demeure de l’employeur et qu’il est évident que la réduction de l’activité a été imposée en raison de la pandémie. Le collaborateur ou la collaboratrice ne peut cependant en aucun cas en être tenu responsable. L’ordre a été donné par la Confédération qui prévoit, dans les cas où les établissements ont été contraints de réduire ou suspendre leur activité, la possibilité de l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail. Cela permet de compenser le risque de l’«obligation de verser le salaire malgré l’absence de prestation de travail». Alors que les hôpitaux privés ont touché des indemnités pour réduction de l’horaire de travail, cela ne vaut pas pour les hôpitaux de droit public. Pourquoi? Parce que le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) part du principe que les entreprises de droit public n’assument pas de risque d’exploitation. Autrement dit, l’Etat, les pouvoirs publics, soutiennent ces entreprises. Dans cette optique, il incombe aussi aux pouvoirs publics d’assumer le risque du versement du salaire, risque qu’ils n’ont pas le droit de répercuter sur les collaboratrices et collaborateurs en générant des heures négatives.

Bettina Surber,  avocate de la section asmac Saint-Gall/Appenzell, «Journal asmac» 5/2021

 

Dois-je rattraper les heures négatives accumulées pendant la pandémie de coronavirus? Que se passe-t-il si j’avais des heures supplémentaires au début de la pandémie?

Au début de la pandémie de coronavirus, les questions soulevées dans le conseil juridique se rapportaient principalement au problème des heures supplémentaires. Il est vite apparu qu’en raison des mesures prises, de l’interdiction de procéder à des interventions électives et de la vague de cas plutôt modérée en Suisse allemande, de nombreuses heures négatives allaient s’accumuler pour les-quelles une solution devait être trouvée.

Par ailleurs, il avait été décidé, en vertu de l’ordonnance 2 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (COVID-19), que dans les services confrontés à une augmentation massive du travail en raison du nombre de cas dus au COVID-19, les dispositions de la loi sur le travail relatives au temps de travail et de repos seraient suspendues, une situation qui a prévalu du 16 mars 2020 au 31 mai 2020. Cette modification a notamment permis de passer au travail en deux équipes, ce qui a toutefois eu pour conséquence une sous-planification qui a généré davantage d’heures négatives.

Les conséquences des heures négatives dues au coronavirus ne peuvent pas être répercutées sur le personnel. D’après la doctrine et la jurisprudence, il s’agit ici du cas de demeure de l’employeur (art. 324 CO) lorsque l’employé a offert sa prestation de travail et que l’employeur n’a pas pu lui attribuer de travail. Dans ces circonstances, la seule solution correcte est de verser l’intégralité du salaire et de solder les heures négatives. Pendant une pandémie, le risque lié à l’entreprise ne peut pas non plus être répercuté sur le personnel.

Souvent, il se pose la question de savoir ce que cela signifie pour les employés dont le solde d’heures était positif au début de la pandémie. La compensation d’heures supplémentaires n’est possible qu’avec l’accord du travailleur (art. 321c al. 2 CO). L’employeur ne peut donc pas simplement ordonner de compenser des heures supplémentaires si une interruption de l’exploitation survient. Il dé-coule cependant de l’art. 321 CO l’obligation pour l’employé de contribuer de bonne foi à la compensation des heures supplémentaires, si les intérêts prépondérants de l’employeur l’exigent et qu’il n’y a pas d’intérêts majeurs de l’employé qui s’y opposent. Généralement, il sera acceptable pour ce dernier de compenser des heures supplémentaires si l’entreprise doit fermer ou réduire le travail à cause de la pandémie. Le travailleur est alors tenu d’accepter la compensation.

L’asmac a élaboré avec H+ et l’ASI une notice explicative pour les établissements concernés et leurs membres relative à la manière de procéder, notamment concernant les heures négatives. Les sections s’efforcent de trouver des solutions équitables sur cette base dans le cadre du partenariat social existant. Pour cela, les sections dépendent de vos informations et sont donc reconnaissantes si vous les contactez au cas où les choses ne se dérouleraient pas correctement sur votre lieu de travail et qu’une intervention de la section asmac locale deviendrait nécessaire, ou si vous avez d’autres questions juridiques.

Janine Junker, avocate et directrice de la section asmac Berne, «Journal asmac» 5/2020

Un médecin-assistant a un accident quelques jours avant le terme de son contrat de travail à durée déterminée dans l’hôpital X et ne peut entrer en fonction chez son nouvel employeur, l’hôpital Y, que 20 jours plus tard que prévu. Quelles consé-quences cela engendre-t-il? Quel employeur doit verser le salaire? Cela se répercute-t-il sur le contrat de travail à l’hôpital Y?

L’accident s’est produit pendant les rapports de travail à l’hôpital X. L’assurance-accidents de l’employeur X doit donc reconnaître le cas et verser les indemnités journalières. Les indemnités journalières sont dues au-delà de la fin des rapports de travail. L’incapacité de travail et ses conséquences ne sont pas assurées auprès du nouvel employeur, étant donné que l’évènement s’est produit avant l’entrée en fonction.

Suite à la communication de l’incapacité de travail par le médecin-assistant, l’employeur Y a prié ce dernier de signer un nouveau contrat de travail débutant à une date ultérieure, ce qui n’est pourtant pas nécessaire. L’employeur Y n’est pas tenu de verser le salaire pendant la durée de l’incapacité de travail. De plus, une éventuelle période d’essai est prolongée de la durée de la réduction effective, sinon le but de la période d’essai ne peut pas être atteint. En cas d’absences prolongées, il se peut que les rapports de travail soient résiliés pendant la période d’essai vu que l’on ne tombe pas sous le coup des dispositions de protection applicables en cas de maladie, d’accident ou de maternité.

Un autre point à ne pas négliger en cas d’adaptation du contrat et d’absences concerne les règles de prise en compte de la période de formation postgraduée en vertu de l’art. 31 de la Réglementation pour la formation postgraduée. La notice correspondante de l’ISFM fournit des informations à ce sujet. En règle générale, les absences sans faute de la personne d’une durée maximale de huit semaines par année ne doivent pas être rattrapées et la période de formation postgraduée est entièrement prise en compte.

Cette situation montre les risques auxquels on s’expose avec un contrat de travail à durée déterminée en cas d’incapacité de travail. Par ailleurs, il vaut la peine d’analyser la situation en matière d’assurance lorsque l’on change d’emploi. L’assurance-accidents accorde une couverture complémentaire de 30 jours. Ensuite, on peut conclure une assurance par convention pour une durée d’au maximum 180 jours avant de devoir inclure le risque-accidents auprès de l’assurance-maladie. L’assurance-maladie d’indemnités journalières n’accorde par contre aucune couverture complémentaire. Elle n’offre que la possibilité d’un passage dans l’assurance individuelle.

Janine Junker, directrice et juriste de la section asmac Berne, «Journal asmac» 5/2022

 

Je veux être engagée comme médecin dans un cabinet. Le cabinet me propose un contrat selon lequel le salaire dépend du chiffre d’affaires. Il prévoit un salaire brut de 45 pourcent de mon chiffre d’affaires sur les prestations médicales, la prestation médicale incluant le montant total à la prestation selon Tarmed (PM et PT). Est-ce légal?

Le Tribunal fédéral considère d’une manière générale qu’un salaire à la commission, c’est-à-dire qui, comme dans votre cas, comprend 45 pourcent du chiffre d’affaires comme salaire, est admissible. Le montant de ce chiffre d’affaires doit cependant vous permettre de réaliser un revenu approprié. Cela signifie qu’avec la participation de 45 pourcent sur le chiffre d’affaires, vous devez réaliser un salaire qui correspond à votre formation, à votre expérience et à la branche. Pour éviter les mauvaises surprises, il est recommandé d’obtenir un aperçu des chiffres d’affaires réalisés par le cabinet jusqu’ici. Cela pour vous permettre de constater si vous pourrez effectivement réaliser un revenu approprié. Un autre point important que vous devez régler est celui du salaire en cas de maladie pour éviter d’éventuelles disputes à ce sujet. Habituellement, on prévoit une indemnité correspondant au salaire moyen réalisé avant l’incapacité de travail. La meilleure solution est une assurance-maladie d’indemnités journalières dans laquelle un salaire clairement défini est assuré.

Claudia von Wartburg, avocate et directrice de la section asmac des deux Bâle, «Journal asmac» 3/2021

 

Je suis en quarantaine pour dix jours suite à un contact que j’ai eu le vendredi avec un ami testé positif au COVID-19 durant le week-end. Le mercredi, je commence à ressentir des symptômes et me fais tester: je suis aussi positif. Dès lors, je dois me mettre en isolement. Aurai-je toujours droit à mon salaire? Qui va me le payer?

Si vous êtes salarié, en cas d’empêchement de travailler pour une raison inhérente à la personne du travailleur telle qu’une maladie, l’art. 324a CO prévoit une obligation pour l’employeur de payer le salaire pendant une période déterminée, à certaines conditions.

Dans la pratique, l’employeur conclut généralement une assurance perte de gain maladie qui couvre le versement du salaire à 80 pourcents. Les indemnités journalières versées par l’assureur libèrent l’employeur du versement du salaire. Ces contrats peuvent prévoir un délai de carence pendant lequel l’assurance n’intervient pas. Pour les courtes maladies, l’employeur assume ainsi durant cette période le salaire de ses collaborateurs, qu’il est autorisé à payer à 80 pourcents. Un délai de carence d’un à trois jours sans salaire est cependant licite.

Parfois, le contrat prévoit le versement du salaire en plein en cas de maladie. C’est alors l’employeur qui assume la différence avec le montant payé par l’assurance. Dans la fonction publique, la réglementation est différente, le Code des obligations ne s’appliquant pas. Les lois sur le personnel de l’Etat prévoient généralement le versement de l’entier du salaire. S’agissant du coronavirus, toutes les personnes testées positives sont considérées comme malades, même si elles sont asymptomatiques. Elles bénéficient ainsi de ce régime et sont payées selon ce que prévoit leur contrat ou la loi, qu’il y a lieu de consulter en cas de doute. La situation de la quarantaine est différente puisque la personne n’est pas malade mais doit rester à la maison pour des questions sanitaires, de façon à éviter la propagation de la maladie.

La nouvelle loi COVID-19 prévoit le droit à une allocation pour perte de gain en cas de coronavirus pour les personnes mises en quarantaine qui ne peuvent effectuer du télétravail, si elles sont salariées ou indépendantes et qu’elles sont assurées à l’AVS. Il faut pour cela que la quarantaine ait été prescrite par un service cantonal ou un médecin. Une alerte de l’application SwissCovid ne suffit pas. Le droit à l’allocation débute dès le premier jour de la quarantaine et dure au maximum dix jours. Il est aussi garanti pour le parent dont un enfant est en quarantaine. Cette allocation est versée par les caisses de compensation AVS. L’indemnité se monte à 80 pourcents du revenu moyen soumis à l’AVS obtenu avant le début du droit, mais au plus à 196 francs par jour pour les salariés.

Dans votre cas, le droit à l’allocation est donné pour les premiers jours de quarantaine. Par contre, dès le résultat du test positif et votre mise en isolement, le droit aux APG tombe et le cas relève exclusivement de la maladie. Les indemnités étant versées via l’employeur, le salarié n’aura pas de démarche à faire pour recevoir son salaire, si ce n’est lui remettre son certificat médical ou de quarantaine. Une bonne connaissance de ces règles lui sera tout de même utile pour comprendre une éventuelle diminution de son salaire et en vérifier la légalité. Le médecin indépendant devra faire une demande à sa caisse pour bénéficier des APG. Elles sont calculées sur la base du revenu annuel converti en gain journalier qui a servi pour fixer sa dernière cotisation personnelle AVS.

Ainsi, différents mécanismes et instances entrent en œuvre pour combler, en partie, les pertes de gain subies durant la pandémie. Les règles du droit du travail servent à garantir les droits des travailleurs alors que les compléments instaurés par les mesures et par la loi COVID-19 ont pour but d’alléger les charges qui pèsent sur les épaules de l’employeur ou de l’indépendant.

Véronique Aeby, avocate de la section asmac Fribourg, «Journal asmac» 2/2021

 

Je travaille comme médecin-assistant à 80 pourcent. Selon mon contrat, j’ai droit à une augmentation de salaire chaque année. Après douze mois d’activité, j’ai demandé une augmentation à mon employeur. Curieusement, celle-ci m’a été refusée, au motif que – compte tenu de mon taux d’activité – je devais avoir travaillé durant 15 mois pour y prétendre (15 mois à 80 pourcent = 12 mois à 100 pourcent). Est-ce correct?  

Le montant du salaire peut être défini par la loi, une convention collective de travail ou par le contrat individuel de travail. Il en va de même des conditions d’une augmentation de salaire, qui n’est en outre pas obligatoire. L’augmentation de salaire peut, par exemple, dépendre des années de service. Dans ce cas, elle peut notamment avoir pour but de récompenser la fidélité d’un employé ou de valoriser l’expérience acquise.

La question se pose alors effectivement de savoir si le taux d’activité influence le droit à une augmentation. Plusieurs solutions sont envisageables selon le ou les buts visés par l’augmentation de salaire:  

  1. L’année de service se calcule indépendamment du taux d’activité. Un employé à 80 pourcent aura donc droit à l’augmentation dès douze mois d’activité.
  2. L’année de service se calcule au prorata du taux d’activité. Un employé à 80 pourcent devra donc travailler durant 15 mois (15 mois à 80 pourcent = 12 mois à 100 pourcent) pour avoir droit à l’augmentation.
  3. Une solution intermédiaire consiste à prévoir un seuil à partir duquel l’année de service se calcule indépendamment du taux d’activité (et en dessous duquel l’année de service se calcule au prorata du taux d’activité). Un employeur pourra, par exemple, fixer ce seuil à 50 pourcent d’activité. Dès lors, pour pouvoir prétendre à l’augmentation de salaire, un employé à 40 pourcent devra travailler durant 17 mois (17 mois à 40 pourcent = 12 mois à 100 pourcent) tandis qu’il suffira à l’employé engagé à 80 pourcent de travailler durant douze mois.

Comme indiqué plus haut, le choix entre ces différentes solutions est généralement fixé dans les documents contractuels. Il arrive cependant que les textes se limitent à prévoir une augmentation annuelle de salaire, sans préciser si le taux d’activité exerce une influence dans la comptabilisation du temps. Il faut alors se demander quel est le but de l’augmentation. Si l’employeur désire uniquement fidéliser son employé, il récompensera son ancienneté, c’est-à-dire les années passées à son service. L’augmentation interviendra alors indépendamment du taux d’activité. Au contraire, l’employeur qui souhaite exclusivement valoriser l’expérience acquise par un employé reconnaîtra le temps effectivement passé à accomplir ses tâches. Il fera par conséquent dépendre l’augmentation de salaire du taux d’activité. La solution intermédiaire présentée ci-dessus permet de tenir compte des deux composantes et de valoriser fidélité et expérience.

Dans la mesure où le pourcentage d’activité influence déjà le montant du salaire, sa prise en compte lors du calcul des années de service ne devrait être possible que si elle est expressément prévue ou s’il ressort clairement des documents contractuels que l’augmentation a pour but de valoriser l’expérience acquise, donc le temps effectivement passé à travailler.

Joël Vuilleumier, juriste de la section asmac Neuchâtel, «Journal asmac» 6/2020

Deux membres souhaitent savoir s’ils peuvent faire corriger leur certificat de travail. Un membre ne veut pas que les absences prolongées pour cause de maladie suite à un burn-out soient mentionnées dans le certificat. L’autre demande par contre qu’une maladie somatique aiguë, qui avait nécessité une intervention chirurgicale pendant les rapports de travail et qui s’était répercutée sur ses performances, soit expressément mentionnée dans le certificat de travail.

La loi ne s’exprime pas sur les formulations dans un certificat de travail, ce qui suscite souvent l’incertitude chez les employeurs. Les principes résultent tous de la jurisprudence. Le certificat de travail doit être conforme à la vérité mais également bienveillant, même si dans la pratique, il faut accorder la priorité à la vérité. Selon la doctrine et la jurisprudence, une maladie peut être mentionnée dans le certificat de travail pour autant

  • qu’elle ait fortement influencé la performance ou le comportement de la collaboratrice ou du collaborateur;
  • qu’elle remettait en doute l’aptitude pour la réalisation des tâches accomplies jusqu’ici et qu’elle représentait donc un motif objectif de résiliation du contrat de travail;
  • que la maladie pesait lourd par rapport à l’ensemble de la durée contractuelle au point que le fait de ne pas la mentionner créerait une fausse impression pour ce qui concerne l’expérience professionnelle acquise.

La décision n’est cependant pas toujours claire dans la pratique. Dans le cas concret, il faut toujours prendre en considération l’ensemble des éléments du cas particulier. Il en va de même pour les deux exemples susmentionnés.

Dans le premier cas – un burn-out –, le collaborateur a été absent pour cause de maladie pendant 12 mois et 3 mois pour cause de libération de l’obligation de travailler sur les 36 mois de son engagement. La jurisprudence considère que la durée de la maladie n’est pas encore significative par rapport à la durée de l’engagement. Comme le collaborateur a lui-même constaté sa maladie à temps et suivi un traitement, sa maladie n’a influencé ni ses performances ni son comportement. Et comme l’employeur n’a pas résilié le contrat de travail en raison de la maladie, mais qu’une résiliation des rapports de travail a finalement été convenue à l’initiative du collaborateur, il n’est pas permis de mentionner dans le certificat de travail une absence prolongée pour cause de maladie. Le collaborateur pourra donc exiger avec succès la rectification de son certificat de travail.

Dans le deuxième cas – maladie somatique aiguë –, la collaboratrice a subi une intervention chirurgicale pendant son engagement de deux ans. Il est avéré que la maladie s’est traduite par une baisse des performances de la collaboratrice. Toutefois, même après l’intervention chirurgicale, les performances ne correspondaient pas aux attentes de l’employeur, raison pour laquelle les performances insuffisantes ne pouvaient pas uniquement être justifiées par une maladie somatique aiguë entre-temps guérie, ce qui a finalement conduit à la résiliation des rapports de travail. L’employeur n’a pas mentionné la maladie dans le certificat de travail, ce qui était correct. La collaboratrice était cependant d’avis que celle-ci doit être mentionnée, étant donné que la maladie a fortement entravé sa capacité de travailler, ce qui permettait à l’employeur de justifier le licenciement.

Si la collaboratrice souhaite explicitement que la maladie soit mentionnée, il n’en résultera pas de litige. L’employeur corrigera le certificat de travail selon le désir de l’employée. Mais comme le licenciement a été prononcé parce que la collaboratrice ne satisfaisait pas aux exigences liées à son poste, le fait de mentionner la maladie n’améliorera pas l’appréciation générale dans le certificat de travail. Il est même très probable qu’elle ne sera même pas invitée à un entretien d’embauche parce que la maladie figure dans le certificat de travail. De nombreux responsables du personnel et supérieurs hiérarchiques associent la maladie au risque et à des absences potentielles. Les candidats qui présentent ouvertement leurs maladies finissent souvent sur la pile des refus, sans avoir la possibilité de se présenter. Une résiliation peut par contre survenir dans tout curriculum vitae, p. ex. si la relation entre le collaborateur et le supérieur hiérarchique n’était pas bonne. Si pour le reste, le dossier comprend de bons certificats de travail, on restera dans la course, malgré le licenciement.

Si l’on n’est pas satisfait du contenu d’un certificat de travail et qu’il ne correspond pas à la réalité et aux appréciations passées, on peut exiger sa rectification devant les tribunaux. Le délai de prescription du droit au certificat est de dix ans et court à compter de la fin des rapports de travail. Il est cependant recommandé d’essayer dans un premier temps d’obtenir une rectification par l’employeur sans recourir à un tribunal, de préférence en soumettant sa propre proposition. En effet, la plupart des rectifications de certificats de travail peuvent être obtenues sans les tribunaux. Si vous avez des questions ou besoin d’aide pour formuler un certificat, nous vous assistons volontiers.

Susanne Hasse, juriste de la section asmac Zurich/Schaffhouse, «Journal asmac» 4/2020

 

J’ai été licencié. A cette occasion, mon employeur m’a libéré de mon obligation de travailler. Peut-il dès lors m’obliger à compenser mes vacances et mes soldes d’heures supplémentaires pendant la période de libération de l’obligation de travailler?

Pour clarifier d’emblée certains termes, il est important de connaître la différence entre heures supplémentaires et travail supplémentaire. Sont considérées comme heures supplémentaires les heures qui sont accomplies au-delà du temps de travail normal convenu. Par conséquent, les heures dépassant la durée hebdomadaire maximale de travail selon la loi sur le travail sont considérées comme travail supplémentaire. Pour les médecins-assistant(e)s, cette limite est fixée à 50 heures par semaine; pour les chef(fe)s de clinique, les mêmes règles s’appliquent, sauf si l’employeur de droit public ne relève exceptionnellement pas du champ d’application de la loi sur le travail.[1]

Pour ce qui concerne l’indemnisation de vacances, il est interdit de remplacer les vacances par des prestations pécuniaires. Cette interdiction vaut au-delà des rapports de travail existants et s’applique aussi au terme de ceux-ci. Mais comme souvent dans le droit, il y a certaines exceptions. Généralement, le rapport entre durée de la libération de l’obligation de travail et droit aux vacances ainsi que la manière dont l’employé met à profit son temps libre sont déterminants. Plus la libération de l’obligation de travailler est longue, plus les vacances peuvent être considérées comme prises.

Cette exception est liée au fait que l’employé doit consacrer un certain temps à la recherche d’un nouvel emploi. Certains tribunaux appliquent comme règle de base qu’un tiers des jours de libération peuvent être imputés comme jours de vacances. Il faut cependant toujours tenir compte des circonstances du cas particulier. Cela nous conduit à une deuxième exception: si l’employé a dû utiliser toute la durée de la libération de l’obligation de travailler pour la recherche d’un emploi et qu’il n’a pas eu la possibilité de partir en vacances pour se reposer, il n’est pas obligé d’accepter l’imputation de l’ensemble des vacances. Inversement, il résulte donc que l’employé qui prend effectivement des vacances pendant la période de libération de l’obligation de travailler doit accepter que l’ensemble de la durée soit imputée comme vacances et pas seulement la durée plus courte selon la règle de base susmentionnée.

Concernant la compensation d’heures supplémentaires pendant la durée de la libération de l’obligation de travailler, il faut tenir compte des points suivants. D’après la loi (article 321c alinéa 2 CO, Code des obligations), la compensation d’heures supplémentaires par un congé n’est possible qu’avec l’accord du travailleur. L’alinéa 3 de l’article 321c CO prescrit que l’employeur est tenu de rétribuer les heures de travail supplémentaires qui ne sont pas compensées par un congé en versant le salaire normal majoré d’un quart au moins, sauf clause contraire d’un accord écrit, d’un contrat-type de travail ou d’une convention collective. D’après la jurisprudence du Tribunal fédéral, la compensation d’heures supplémentaires pendant la durée de la libération de l’obligation de travailler par un congé requiert aussi l’accord du travailleur. L’employeur ne peut donc ordonner unilatéralement la compensation d’heures supplémentaires pendant la durée de la libération de l’obligation de travailler.

Outre la discussion concernant la compensation des heures supplémentaires, il vaut la peine de porter un regard sur la situation juridique au sujet de la compensation du travail supplémentaire. L’article 13 LTr règle l’indemnité pour le travail supplémentaire. L’alinéa 1 prévoit – comme pour les heures supplémentaires – un supplément de salaire d’au moins 25% pour le travail supplémentaire. L’alinéa 2 de l’article 13 LTr prévoit aussi que le travail supplémentaire ne donne droit à aucun supplément de salaire lorsqu’il est compensé, avec l’accord du travailleur et dans un délai convenable, par un congé de même durée. Comme pour les heures supplémentaires, l’accord du travailleur est nécessaire pour la compensation du travail supplémentaire. Cela vaut également en cas de libération de l’obligation de travailler.

Pour éviter des litiges pénibles et coûteux, il est recommandé, du point de vue de l’employé, de régler les modalités de la compensation des heures supplémentaires, du travail supplémentaire et le droit aux vacances dans une convention de libération de l’obligation de travailler écrite avec l’employeur respectif. L’article 341 al. 1 CO offre une sécurité supplémentaire. En effet, il prévoit que le travailleur ne peut pas renoncer, pendant la durée du contrat et durant le mois qui suit la fin de celui-ci, aux créances résultant de dispositions impératives de la loi ou d’une convention collective. Avant de signer une telle convention, il est recommandé de la soumettre à un juriste pour examen. Les juristes des sections sont volontiers à votre disposition pour vous conseiller.

Samuel Nadig, juriste et directeur de la section asmac Grisons, «Journal asmac» 1/2020

[1] La loi sur le travail s’applique aux médecins-assistant(e)s, indépendamment du fait que l’entreprise soit assujettie à la loi sur le travail ou non. Pour les chef(fe)s de clinique, les dispositions en matière de durée du travail et du repos de l’employeur ne s’appliquent que si l’entreprise est assujettie à la loi sur le travail. Ce n’est généralement pas le cas lorsqu’elle appartient directement à l’administration cantonale.

 

J’ai été engagée comme cheffe de clinique pour une durée initiale d’un an. Par la suite, mon contrat a été prolongé pour trois ans supplémentaires, jusqu’à la fin juin 2020. Aujourd’hui, je ne suis plus satisfaite des conditions de travail. Pour des raisons privées également (déménagement), je souhaite quitter ce poste au 30 septembre 2019. N’ayant pas été très attentive à la signature de mon contrat, je constate que celui-ci ne prévoit pas de délai de résiliation. Comment dois-je procéder?

Le contrat que vous avez signé est un contrat de travail à durée déterminée (CDD), valable jusqu’au 30 juin 2020. Cela signifie que le contrat prend fin à l’échéance du terme prévu, sans qu’il ne soit nécessaire de donner congé (cf. art. 334 al. 1 CO). Il prend fin automatiquement par le seul écoulement du temps.

Le corolaire, auquel les parties ne prêtent pas toujours attention lors de leur engagement, est que le contrat ne peut pas être résilié de part et d’autre avant le terme, sauf si le contrat le prévoit expressément. Seules demeurent les causes extraordinaires de résiliation (licenciement immédiat pour juste motif). Ainsi, vous ne pouvez pas démissionner et seule une convention de départ intervenant d’un commun accord peut mettre un terme anticipé au contrat.

Dans votre situation, il vous appartient de prendre contact avec votre employeur pour l’informer de votre volonté et solliciter son accord. Juridiquement, l’employeur n’est pas tenu d’accepter, de sorte que des négociations parfois ardues peuvent être nécessaires. Il est donc conseillé de s’y prendre suffisamment à l’avance.

Certains CDD prévoient toutefois la possibilité d’une résiliation anticipée. Cela doit être expressément mentionné sur le contrat, qui fixera alors des délais de résiliation. Ce sont les contrats dits de durée maximale. Parfois, une résiliation n’est possible que durant la première année probatoire, mais plus par la suite. Il est donc impératif de bien analyser le contenu de votre contrat et des règlements d’entreprise ou dispositions légales applicables (p. ex. loi sur le personnel de l’Etat).

Prenez garde encore à une autre conséquence négative des CDD: la protection contre le licenciement en temps inopportun ne s’applique pas. Le contrat de travail prend donc fin même en cas d’incapacité de travail ou en cas de grossesse, ce qui peut s’avérer particulièrement discriminatoire pour les femmes.

Dans la pratique, le prétexte de la formation sert régulièrement à justifier un engagement à durée déterminée. Les conséquences négatives qui en résultent sont bien souvent négligées. N’oubliez pas que la flexibilité qui découle d’un contrat à durée déterminée avec possibilité de résiliation se révèle généralement favorable surtout à l’employeur!

Véronique Aeby et Pierre Mauron, juristes de la section asmac Fribourg, «Journal asmac», 3/2019

 

Actuellement engagé par contrat de durée déterminée (du 1er novembre 2017 au 31 octobre 2019), j’ai trouvé un nouveau poste dans un autre hôpital qui commencerait à partir du 1er novembre 2018. Puis-je accepter cette offre?

De manière générale, un contrat de durée déterminée prend fin sans résiliation au terme de la durée convenue. Par principe, il n’est pas possible d’y mettre fin avant terme, sauf exception prévue dans le contrat ou si les deux parties sont d’accord.

Mon contrat actuel ne prévoit aucune possibilité de résiliation anticipée et mon employeur n’est pas d’accord de me libérer avant terme.

Exceptionnellement, il est possible de résilier le contrat avec effet immédiat pour de justes motifs. De tels motifs sont par exemple des conditions de travail qui rendent impossible la poursuite de la relation de travail (atteinte à la personnalité ou non-paiement du salaire par exemple).

Un changement d’orientation professionnelle ou une nouvelle formation ne sont pas de justes motifs.

Mes conditions de travail, bien que difficiles, sont conformes à la loi. Mon salaire a toujours été payé dans les temps.

Dans ces conditions, il n’est pas possible de résilier votre contrat de manière anticipée.

Et si je décide quand même de quitter mon poste au 31 octobre 2018?

Si vous décidez néanmoins de quitter unilatéralement votre emploi avant terme sans pouvoir invoquer de juste motif, vous serez tenu de réparer le dommage subi par votre employeur du fait de votre départ abrupt.

Quel peut être le montant de ce dommage?

En pratique et conformément à la loi (art. 337d CO), votre employeur pourra déduire un quart de salaire sur votre dernière fiche de paie.

Si son dommage effectif est supérieur à cette retenue forfaitaire, il pourra vous réclamer davantage. Il devra alors prouver son dommage et introduire un procès à votre encontre (en principe dans les 30 jours suivant votre départ). Si vous estimez en revanche que son dommage est inférieur à la retenue forfaitaire, vous devrez réclamer en justice la part retenue en trop par votre employeur.

Le dommage représente le coût occasionné à votre employeur suite à votre départ. Les frais d’annonce pour la recherche d’un nouveau collaborateur ne font donc pas partie de ces coûts, puisque votre employeur aurait dû les supporter de toute façon. Par contre, si vos collègues doivent effectuer des heures supplémentaires rémunérées à 125% spécifiquement à cause de votre départ, ce surcoût pourrait être mis à votre charge.

Ainsi, plus vous informez votre employeur à l’avance, plus celui-ci pourra entreprendre rapidement les démarches lui permettant de réduire son dommage (c’est-à-dire vous trouver un successeur pour assurer la bonne marche du service après votre absence).

Joël Vuilleumier, juriste de la section asmac Neuchâtel, «Journal asmac» 3/2018

 

Quand un certificat de travail est-il bienveillant, clair et véridique?

Après trois ans et demi d’activité dans un cabinet, un médecin reçoit un certificat final comprenant les formules suivantes: «Hélas, des erreurs médicales se sont produites en cours d’emploi.» Le médecin a été licencié, notamment suite à ces reproches. Une année auparavant, il avait encore reçu un bon certificat intermédiaire. Les reproches n’ont pas été concrétisés et l’employé conteste avoir commis des erreurs médicales.

En vertu de l’article 330a alinéa 1 CO, tous les employés ont droit à un certificat portant sur la nature et la durée des rapports de travail, ainsi que sur la qualité du travail et le comportement. Sur le plan du contenu, un certificat doit comprendre les éléments suivants:

  • données personnelles de l’employé,
  • informations nécessaires permettant d’identifier l’auteur et signature de ce dernier et date d’établissement,
  • début et fin des rapports de travail,
  • énumération détaillée des fonctions importantes et des activités ayant marqué les rapports de travail et leur durée, et
  • évaluation pertinente de la prestation de travail et du comportement.

Un certificat doit être formulé selon les principes suivants:

  • exhaustivité,
  • véracité,
  • proportionnalité,
  • bonne foi et
  • bienveillance.

Un certificat doit encourager le développement professionnel de l’employé tout en fournissant une image réaliste au futur employeur. Ces exigences peuvent entraîner des discussions et un conflit d’intérêt; ce qui s’est produit dans ce cas. L’employeur insiste pour que les erreurs médicales, que l’employé conteste, soient mentionnées. Même si des erreurs de traitement se sont effectivement produites, je suis d’avis qu’elles ne doivent pas être mentionnées, sauf si elles sont de nature extrêmement grave. Le certificat doit fournir un aperçu juste de l’ensemble des rapports de travail et ne pas se focaliser sur leur fin souvent mouvementée. On mentionnera par ailleurs que l’on n’a pas droit à des remerciements, ni vœux pour l’avenir.

Dans ce cas, la demande de restitution du certificat intermédiaire établi précédemment est passée au second plan. Dans le courant de la procédure, l’employeur a affirmé que des erreurs, qui s’étaient produites avant l’établissement du très bon certificat intermédiaire, avaient été découvertes ultérieurement. Suite à cela, il a demandé la restitution du certificat intermédiaire. A mon avis, le certificat de travail est un document que l’on ne peut pas demander en restitution. L’employeur l’avait établi sans conditions et aurait dû (mieux) en vérifier préalablement le contenu.

Le cas n’a pas encore été soumis à l’appréciation du tribunal. En principe, il est recommandé de vérifier soigneusement le certificat de travail avant de le signer et, en cas de doute, de faire appel au conseil d’un avocat.

Janine Junker, avocate et directrice de la section asmac Berne, «Journal asmac» 4/2018

Je travaille en tant que médecin-assistante dans un hôpital. J’ai appris qu’un délai de prescription prolongé pour les dommages corporels s’appliquait depuis le 1er janvier 2020. Ce changement se répercute-t-il sur mon travail quotidien?

En principe, le nouveau délai de prescription concerne tous les médecins, qu’ils soient employés ou en pratique privée, qu’il s’agisse d’une médecin-assistante ou d’un médecin-chef. Si un patient subit un dommage dans le cadre d’un traitement, une action civile peut être intentée contre son médecin traitant. Il faut par conséquent conserver les dossiers médicaux. Nouvellement pendant vingt ans au lieu de dix ans comme jusqu’ici.

En tant que médecin employée, vous pouvez partir du principe que la conservation du dossier médical et le respect du délai de prescription sont assurés par l’employeur. Il est important que tous les médecins traitants aient conscience de l’importance du dossier médical en cas de procès. Il est donc essentiel d’assurer la mise à jour du dossier médical. Il doit, le cas échéant, permettre de reconstituer le traitement.

Droit privé vs. droit public

Pour la relation de traitement de droit privé, le délai de prescription absolu pour tous les dommages corporels et décès est prolongé de 10 à 20 ans suite aux modifications du droit de la prescription entrées en vigueur le 1er janvier 2020. Les relations de traitement de droit public continuent d’être régies par le droit public cantonal. A l’heure actuelle, les cantons ne peuvent pas encore dire si les délais cantonaux de conservation pour les dossiers médicaux passeront à 20 ans.[1] Il est donc recommandé de conserver les dossiers médicaux pendant 20 ans, indépendamment des prescriptions cantonales.

Pour les médecins, le nouveau délai de prescription a des conséquences concrètes en cas d’action civile: si un médecin fait l’objet d’une plainte, le dossier médical constitue un moyen de preuve essentiel. En effet, il permet de reconstruire toutes les phases du traitement et de constater si le patient a donné son accord à temps et été suffisamment informé. Pour que ces moyens de preuve puissent être présentés en cas de procès, ils doivent être conservés pendant toute la durée du délai de prescription.

Couverture de l’assurance responsabilité civile

La prolongation du délai de prescription a encore d’autres conséquences pratiques en rapport avec la couverture de l’assurance responsabilité civile après la cessation de l’activité. Aujourd’hui, cette couverture est généralement de 10 ans. A l’avenir, il faudra assurer une couverture de 20 ans, ce qui nécessite d’adapter la police d’assurance.

Délais transitoires

Pour autant que le nouveau droit prévoie un délai plus long que l’ancien droit, il ne s’applique toutefois seulement si au moment de l’entrée en vigueur, c’est-à-dire le 1er janvier 2020, la prescription selon l’ancien droit n’est pas encore acquise. Ce n’est que la durée, mais pas la date à laquelle le délai a commencé à courir qui change. Si le nouveau droit définit un délai plus court, le droit actuel continue de s’appliquer. Si par exemple, les 10 ans du délai de prescription absolu ne sont pas encore échus le 1er janvier 2020 pour une prétention découlant d’un acte illicite pour cause de lésion corporelle, il se prolonge à 20 ans. La durée déjà écoulée est imputée sur ces 20 ans.

Remise du dossier médical – droits et restrictions

En rapport avec les nouveaux délais de prescription se pose aussi la question du droit de consulter le dossier médical. Préalablement, il faut souligner que le droit d’information du patient pour la consultation du dossier médical le concernant et le droit à la remise de ces documents en copie sont juridiquement contraignants. Deux restrictions doivent cependant être prises en compte.

La première restriction concerne la communication de données de santé à des tiers et les notes personnelles. Cette partie «subjective» du dossier médical concerne les «informations ou aide-mémoires» qui ne sont destinés qu’au médecin et qui ne se répercutent pas sur le diagnostic ou le traitement (Dominique MANAÏ, L’accès au dossier médical, dans le Journal: Cahiers genevois et romands de sécurité sociale n°28/2002, p. 74 ss.; Tomas POLEDNA/Brigitte BERGER, Öffentliches Gesundheitsrecht, Berne 2002, p. 136).

La deuxième restriction concerne les contre-indications thérapeutiques («au cas où les informations auxquelles un patient pourrait réagir de manière sensible pourraient avoir de graves répercussions sur son état psychophysique ou entraver le résultat du traitement, celles-ci doivent être communiquées à un proche» (art. 6 al. 1, Legge sulla promozione della salute e il coordinamento sanitario Ticino del 18 aprile 1989).

Lorenza Pedrazzini Ghisla, juriste de la section asmac Tessin, «Journal asmac» 2/2020

[1] Ursina Pally Hofmann, Nouveau droit de la prescription, «Bulletin des médecins suisses», p. 1826.

 

L’obligation d’aviser met en péril le secret médical.

La récente révision de la loi sur la santé du canton du Tessin oblige les professionnels de la santé à annoncer les infractions de leurs patients. Cela a déclenché un vif débat au parlement. Une obligation d’aviser, actuellement discutée au niveau fédéral, par exemple en rapport avec le pilote suicidaire de Germanwings ou le meurtre de la sociothérapeute à Genève, soulève des questions difficiles et complexes. En effet, il faut pondérer des intérêts contradictoires: d’une part, l’élucidation de crimes, d’autre part, le respect de l’obligation de garder le secret qui constitue le fondement de la relation thérapeutique. Concrètement, il s’agit de déterminer s’il faut accorder la priorité à la constatation juridique d’une infraction ou à la protection de la relation de confiance entre médecin et patient. Dans ce dernier cas, il s’agit d’empêcher que le patient, qu’il soit victime ou auteur, interrompe un traitement, p. ex. chez un psychiatre, par peur d’être dénoncé par son propre médecin.

L’ordre des médecins du canton du Tessin s’est à plusieurs reprises opposé à une mise en œuvre stricte de l’obligation d’aviser pour les professions soumises au secret professionnel telles que médecins, dentistes, chiropraticiens, pharmaciens, sages-femmes et psychologues, et cela à juste titre. Le Conseil fédéral aussi veut exclure les personnes soumises au secret professionnel de l’obligation d’aviser dans son message concernant la modification du code civil (Protection de l’enfant, 15.033 du 15 avril 2015 (FF 2015 3111)): «En effet, une telle brèche dans le devoir de discrétion pourrait menacer ou détruire la relation de confiance vis-à-vis de l’enfant ou des tiers concernés et desservir le bien de l’enfant. La personne soumise au secret professionnel pourra aviser l’autorité, mais elle ne le fera que si elle estime, après avoir pesé les intérêts en présence, qu’une telle démarche favorise le bien de l’enfant.»

Le parlement tessinois a par contre choisi la répression et confirmé l’obligation pour les professionnels de la santé d’annoncer aux autorités de poursuite pénale «tout cas de maladie, de blessure ou de mort porté à leur connaissance dans l’exercice de leur profession dont la cause probable est assurément ou probablement une infraction» (art. 68 al. 2). La solution tessinoise supprime donc de fait le secret professionnel et oblige le médecin à immédiatement annoncer une infraction. Il n’est donc plus possible d’évaluer la situation dans l’intérêt de toutes les parties impliquées. On peut dès lors légitimement se demander si l’obligation tessinoise viole le droit fédéral qui protège le secret professionnel à différents niveaux: protection de la sphère privée (art. 13, al. 1 de la Constitution fédérale); devoirs professionnels de personnes exerçant une profession médicale universitaire (art. 40f LPMéd); devoirs professionnels de personnes exerçant une profession de la santé (art. 16f LPSan); violation du secret professionnel (art. 321 chiffre 1 CP).

Le sujet est juridiquement controversé. Ainsi, dans son arrêt 1B_96/2013, le Tribunal fédéral n’a pas répondu à la question de savoir si les cantons peuvent contraindre les médecins à annoncer des cas suspects d’infractions.

Lorenza Pedrazzini Ghisla, juriste de la section asmac Tessin, «Journal asmac» 2/2018

Un médecin-assistant a été engagé par une clinique privée pour accomplir une formation postgraduée en vue d’obtenir la formation approfondie en ophtalmochirurgie. Son contrat de travail indique que le coût global de cette formation postgraduée pour la clinique est évalué à CHF 500’000. Compte tenu de ce coût, le contrat contient une clause en vertu de laquelle, après l’obtention de sa formation approfondie, le médecin s’engage à continuer de travailler dans la clinique pendant une durée supplémentaire de quatre années effectives à 100 pour cent en tant que médecin spécialiste. Le contrat de travail contient en outre une clause obligeant le médecin à rembourser le coût de cette formation postgraduée à hauteur de CHF 300’000 en cas d’interruption de la formation postgraduée ou en l’absence d’obtention de la formation approfondie; il prévoit par ailleurs, en cas de fin anticipée du contrat de travail pendant les quatre ans suivant l’obtention de la formation approfondie par suite de démission ou par suite de licenciement pour motif justifié, une obligation de remboursement du coût de la formation postgraduée à hauteur de CHF 300’000 durant la première année, de CHF 225’000 la deuxième année, de CHF 150’000 durant la troisième année et de CHF 75’000 durant la quatrième année. Une telle clause est-elle valable? En d’autres termes, si ce médecin, une fois la formation approfondie en ophtalmochirurgie obtenue, ne souhaite pas travailler dans cette clinique pendant encore quatre ans, peut-il résilier son contrat sans devoir rembourser la somme de CHF 300’000?

La loi prévoit que tous les frais imposés par l’exécution du travail sont à la charge de l’employeur. Elle précise que les accords en vertu desquels le travailleur supporte lui-même tout ou partie de ses frais nécessaires sont nuls (art. 327a al. 3 CO).

En règle générale, les frais d’une formation postgraduée non liée à un employeur déterminé ou à un produit spécifique sont à la charge du travailleur. Sont considérés comme tels les frais des formations postgraduées qui confèrent à l’employé un avantage durable sur le marché du travail (par exemple: les frais d’une formation universitaire à l’étranger visant à l’obtention d’un titre de formation postgraduée). Lorsque l’employeur prend en charge de tels frais de formation – qui sont en principe à la charge de l’employé – il peut donc valablement conclure avec l’employé un accord en vertu duquel ce dernier s’engage à lui rembourser tout ou partie des frais payés s’il démissionne de son poste avant l’échéance d’une période déterminée.

Le cas d’espèce se distingue toutefois de cette situation dans la mesure où la clinique privée, qui emploie le médecin-assistant et assure sa formation postgraduée, entend obtenir non pas le remboursement de frais effectifs qu’elle a avancés au médecin-assistant pour accomplir une formation postgraduée utile à son avenir professionnel, mais le remboursement de ce qu’elle considère comme le coût qu’engendre pour elle la formation postgraduée accomplie en son sein.

Une clinique peut être reconnue comme établissement de formation postgraduée, si elle dispose d’au moins un poste de formation postgraduée rétribué comme il se doit. Si une clinique engage un médecin-assistant pour accomplir sa formation postgraduée, l’encadrement et la formation postgraduée de ce dernier font partie des obligations de l’employeur, comme dans un contrat d’apprentissage. Le médecin-chef ou le médecin responsable de la formation postgraduée doit garantir le respect du programme de formation postgraduée prescrit. L’investissement dans la formation postgraduée de l’employeur est en outre déjà pris en considération dans la fixation d’un salaire moindre que celui d’un médecin spécialiste. Il n’est donc pas admissible de traiter ce que l’employeur considère comme le coût interne de cette formation postgraduée de la même manière que des frais effectifs facturés par des tiers pour une formation postgraduée suivie par l’employé à l’extérieur de l’entreprise.

Au vu de ces éléments et même si cette question n’a à ma connaissance pas encore été jugée par le Tribunal fédéral, il faut donc considérer que la clause de remboursement des frais internes de formation postgraduée prévue dans le contrat de travail de ce médecin-assistant est dénuée de tout fondement juridique. Si, une fois sa formation approfondie obtenue, ce médecin démissionne de son poste dans le respect du délai de congé contractuel, l’employeur ne pourrait donc, à mon avis, pas lui réclamer valablement le paiement du montant de CHF 300’000 prévu dans le contrat.

Christian Bruchez, juriste de la section asmac Genève, «Journal asmac» 5/2018

Une représentante des médecins-assistant(e)s d’un hôpital zurichois demande à l’ASMAC Zurich si les médecins ont le droit de faire la grève. En effet, depuis une éternité, ils sont en sous-effectifs, ce qui rend impossible de respecter la durée du travail légale. Rien ne semble vouloir changer. Leur patience est à bout.

Dans certaines circonstances, le droit de grève est un droit fondamental garanti par la Constitution fédérale (art. 28 CF). D’après la jurisprudence du Tribunal fédéral, la grève est le «refus collectif de la prestation de travail due pour imposer une revendication à propos de conditions de travail spécifiées vis-à-vis d’un ou plusieurs employeurs». Une grève pour imposer des objectifs politiques, p. ex. la modification de la loi sur le travail, serait illicite. De plus, l’article constitutionnel précise aussi que les obligations de préserver la paix du travail ou de recourir à une conciliation doivent être considérées avant toute chose. C’est notamment le cas si les parties ont convenu de recourir à une conciliation ou lorsqu’une convention collective de travail a été conclue. Il faut alors respecter la paix du travail selon l’art. 357a CO (la CCT pour les médecins-assistant(e)s qui s’applique dans le canton de Zurich pour les quatre hôpitaux cantonaux).

La grève comme mesure de lutte (comme la grève des crayons zurichoise en 1998) n’est donc admise que comme ultime recours, si l’employeur refuse de négocier ou que les négociations n’aboutissent pas. Car en cas de grève, l’employeur risque de subir un dommage économique.

D’après la Constitution fédérale, la loi peut interdire le recours à la grève à certaines catégories de personnes. Ainsi, la loi sur le personnel de la Confédération précise que si la sécurité de l’Etat, la sauvegarde d’intérêts importants commandés par les relations extérieures ou la garantie de l’approvisionnement du pays en biens et services vitaux l’exigent, le Conseil fédéral peut limiter ou supprimer le droit de grève pour certaines catégories d’employés. La loi sur le personnel du canton de Zurich et l’ordonnance sur le droit du personnel de la ville de Zurich ne s’expriment pas sur le droit de grève. A Zurich, on estime cependant que, sur la base du devoir de fidélité ancré dans les lois sur le personnel, la grève peut être interdite ou restreinte pour certaines catégories du personnel, par exemple pour l’approvisionnement hospitalier absolument nécessaire.

En d’autres termes: si dans un hôpital le service de garde est assuré et que les médecins-assistant(e)s n’ont pas l’obligation de respecter la paix du travail conformément à la CCT, ils peuvent s’organiser collectivement et faire grève pour obtenir des conditions de travail légales. Toutefois, seulement si des négociations ont été entamées avec l’employeur et que celles-ci n’ont pas abouti. Comme les médecins-assistant(e)s ne souhaitent en général pas s’exposer pour des motifs de carrière dans ce genre de négociations, il faut faire appel à l’ASMAC ZURICH. Celle-ci se charge de représenter les employés dans les négociations avec l’employeur et, si nécessaire, de faire appel à l’inspectorat du travail du canton de Zurich. Dans ce contexte, il est recommandé, comme mesure immédiate, d’analyser les processus de planification des horaires de service avec le soutien du conseil en matière de planification des services de l’asmac Suisse et de voir dans quelle mesure la planification peut du moins être optimisée avec le personnel actuel.

Susanne Hasse, avocate SHlegal et directrice de la section asmac Zurich, «Journal asmac» 6/2018

Un couple avec deux enfants travaille à l’hôpital X. Les deux époux sont employés en tant que chefs de clinique. Les enfants sont pris en charge dans une crèche. Celle-ci reste cependant fermée deux semaines pendant les vacances d’été. C’est pourquoi le mari a déjà annoncé qu’il voulait prendre une semaine de vacances avant les vacances d’été pour se consacrer aux enfants pendant la fermeture de la crèche. La femme a demandé une semaine de vacances pendant la deuxième semaine de fermeture. Les deux parents ont justifié leur demande par l’absence de prise en charge des enfants. Le mari n’a pas obtenu les vacances demandées et s’est vu attribuer un service pendant cette semaine. Est-ce légal?

La loi sur le travail prévoit certains privilèges pour les travailleurs avec obligations familiales. Ainsi, d’après l’art. 36 de la loi sur le travail (LTr), l’employeur doit, lorsqu’il fixe les heures de travail et de repos, tenir compte notamment des responsabilités familiales des travailleurs. Sont réputées responsabilités familiales l’éducation des enfants jusqu’à l’âge de quinze ans ainsi que la prise en charge de membres de la parenté ou de proches exigeant des soins. En d’autres termes: l’employeur doit assurer des engagements réguliers et planifiés. Cette prise en compte ne s’applique que dans la mesure où les besoins du service le permettent.

Dans le cas présent, le désir de vacances justifié ne peut être refusé que si l’employeur peut motiver par des besoins liés au service son refus d’accorder des vacances au mari pendant la semaine souhaitée. Compte tenu du fait que la demande de vacances a été déposée plusieurs mois à l’avance et dûment motivée par le travailleur, le refus ne paraît pas plausible, d’autant plus que tous les travailleurs ont droit à des vacances.

D’après l’art. 36 LTr, un travailleur peut par ailleurs refuser d’accomplir un travail supplémentaire (plus de 50 heures par semaine) si cela l’obligerait à négliger ses responsabilités familiales. Il doit par contre accomplir les heures supplémentaires, pour autant que cela puisse être raisonnablement attendu de lui.

La loi prévoit même qu’un travailleur avec responsabilités familiales peut demander une pause de midi d’une heure et demie pour pouvoir cuisiner pour la famille à la maison. Ce scénario est toutefois moins vraisemblable dans un hôpital, d’autant plus que cette pause de midi ne serait pas payée.

Claudia von Wartburg, juriste de la section ascmac des deux Bâle, «Journal asmac» 2/2019

 

En automne 2017, j’ai commencé à travailler à 100 pourcent comme médecin-assistante dans un hôpital. Début janvier 2018, j’ai accouché de mon enfant et bénéficié d’un congé maternité de 16 semaines conformément à la convention collective de travail. Déjà avant la naissance de mon enfant, j’ai convenu avec mon employeur que je réduirais mon taux d’occupation à 60 pourcent au terme du congé maternité. Jusqu’à la fin de mon congé maternité, mon avoir vacances s’élevait à trois semaines. Ces vacances provenaient de mon engagement antérieur, à 100 pourcent. Mon employeur m’a communiqué que ces trois semaines seront considérées comme trois semaines pour un taux d’occupation de 60 pourcent. Cela a donc pour conséquence que mon indemnité de vacances est réduite. La manière de procéder de mon employeur est-elle correcte?

Pour répondre à cette question, il faut d’abord déterminer s’il s’agit de rapports de travail de droit public ou de droit privé.

Si l’employée est engagée selon un contrat de droit public, il faut vérifier si le droit du personnel cantonal prévoit une disposition répondant à la question de la rémunération de vacances acquises avant une modification du taux d’occupation et sollicitées après l’adaptation du contrat de travail correspondant.

Si la loi ne prévoit aucune disposition, on peut se référer à la pratique développée par la Commission fédérale de recours en matière de personnel fédéral. En principe, le droit aux vacances reste inchangé, même si l’employé modifie son taux d’occupation en cours d’année civile. Il faut toutefois tenir compte du fait que le droit aux vacances ne comprend pas seulement le droit au repos, mais aussi le droit au salaire. Trois semaines de vacances pour un engagement à plein temps sont toujours indemnisées à 100 pourcent. Si le taux d’occupation est réduit à 60 pourcent, l’avoir de vacances préexistant reste inchangé (les trois semaines de vacances sont maintenues, même pour un taux d’occupation de 60 pourcent), toutefois, les vacances ne sont indemnisées plus qu’à 60 pourcent. La perte financière s’élève donc à 40 pourcent. Pour éviter cette inégalité de traitement, il faut, dans ce cas de figure, procéder à une compensation financière: un employé qui n’a pas été en mesure de prendre ses vacances avant le changement du taux d’occupation pour des motifs objectifs ou pour cause d’obligations de service a droit à un paiement compensatoire correspondant à la différence perdue.

La même chose vaut dans le droit privé étant donné l’absence de réglementation en la matière. D’après la doctrine dominante, une réglementation équitable équivaudrait aussi, dans ces circonstances, à verser le salaire conformément au taux d’occupation précédent, même lorsque l’employé perçoit ultérieurement son avoir de vacances. Dans le cas inverse d’une augmentation du taux d’occupation, il faudrait alors accepter que l’employé ne touche que l’ancien salaire inférieur lorsqu’il perçoit des avoirs de vacances résultant du taux d’occupation antérieur.

L’employeur doit conseiller à la personne concernée de percevoir au pro rata temporis son avoir de vacances du taux d’occupation plus élevé avant la modification du contrat. Dans la mesure où l’employé n’est pas en mesure de le faire pour des raisons liées à l’exploitation ou d’autres motifs objectifs, l’employeur doit procéder au paiement compensatoire correspondant en cas de solde de vacances positif. D’après la jurisprudence, l’absence d’injonction de la part de l’employeur demandant à l’employé de percevoir son avoir de vacances restant avant le changement du taux d’occupation constitue un tel motif objectif nécessitant un paiement compensatoire.

Dans le cas présent, l’employeur n’a pas agi correctement. Il aurait dû ordonner à la médecin-assistante de percevoir les vacances restantes avant le changement de son taux d’occupation. Si cela n’était pas possible pour des raisons liées à l’exploitation, l’employeur aurait dû procéder à un paiement compensatoire correspondant. La médecin-assistante peut donc faire valoir son droit à un paiement compensatoire.

Conseil pratique en cas de changement du taux d’occupation: percevez votre avoir de vacances accumulé après le congé maternité et ne procédez qu’ensuite au changement du taux d’occupation. Si cela n’est pas possible, vous devez convenir avec votre employeur du paiement de la différence.

Sandra P. Leemann, juriste des sections asmac Argovie, Soleure, Saint-Gall/Appenzell, Thurgovie et Suisse centrale, «Journal asmac» 1/2019

La CCT à laquelle je suis soumis prévoit un congé de cinq jours pour la naissance d’un enfant, payé à 100 pourcent. Est-ce que ce congé de cinq jours s’ajoute au congé paternité de dix jours récemment introduit par le droit fédéral?

La question posée concerne la coexistence de deux types de congé:

  1. le congé du père pour la naissance d’un enfant et
  2. le «congé de paternité», entré en vigueur sur le plan fédéral le 1er janvier 2021. 

Avant le 1er janvier 2021, les CCT qui s’appliquent aux médecins-assistant(e)s et chef(fe)s de clinique prévoyaient presque toutes un congé de naissance de quelques jours, en général payé à 100 pourcent. Il était en effet communément admis que l’employeur offrait ce congé, comme il offre en général quelques jours payés à 100 pourcent lors du mariage d’un(e) employé(e). Ce congé pour la naissance d’un enfant figure souvent dans un article de la CCT intitulé «congés spéciaux» ou «autres congés». Il fait partie de ce que l’employeur décide d’offrir à ses employé(e)s par convention et crée donc un droit de l’employé à l’égard de l’employeur (droit privé).

Depuis le 1er janvier 2021, le droit fédéral prévoit qu’en cas de paternité, le père a droit à un congé de deux semaines s’il est le père légal au moment de la naissance de l’enfant ou s’il le devient au cours des six mois qui suivent (art. 329g al. 1 CO). Le congé peut être pris en une fois (week-end inclus) ou sous la forme de journées, dans les six mois qui suivent la naissance de l’enfant. Comme pour le congé de maternité, le week-end est également indemnisé. Le père a ainsi droit à 14 indemnités journalières (deux semaines) correspondant à 80 pourcent du salaire. Le salaire est plafonné à CHF 7350.–/mois, ce qui donne une indemnité journalière maximale de CHF 196.–/jour (CHF 7350.– × 0,8 ÷ 30 jours = CHF 196.–/jour). Ce congé représente CHF 2744.– au maximum (14 indemnités × CHF 196.–/jour) et il est financé par le régime des allocations pour perte de gain (APG), soit principalement par les cotisations des employé(e)s, des employeurs et des indépendants. Le père a donc un droit à l’égard de l’Etat (droit public).

Alors qu’en est-il de la coexistence de ces deux droits à un «congé de paternité»? Comment articuler les nouvelles normes du droit fédéral et les dispositions préexistantes prévues par les CCT? La réponse est en fait controversée: certains auteurs estiment que les nouvelles dispositions sur le «congé de paternité» rendent inapplicable toute autre règle, dans la mesure où le «congé de paternité» est plus généreux; d’autres estiment au contraire que les deux droits coexistent, car leur nature est différente: l’employé bénéficierait d’un droit à l’égard de son employeur (prévu par la CCT) et d’un droit à l’égard de l’Etat (prévu par l’art. 329g CO). Si l’on suit cette seconde opinion, l’employé pourrait alors cumuler les deux types de congé. Cette approche risque cependant d’être refusée par l’employeur. Finalement, une troisième interprétation consisterait à dire que l’employeur, qui offrait un congé de naissance de cinq jours payé à 100 pourcent, doit compléter les indemnités du congé de paternité pendant cinq jours pour que le salaire soit payé à 100 pourcent, au lieu de 80 pourcent. Cette solution semble équitable, puisque le droit ancré dans la CCT d’être payé cinq jours à 100 pourcent serait maintenu.

La question reste cependant ouverte.
Quoi qu’il en soit, si l’hôpital souhaite supprimer le congé du père pour la naissance d’un enfant, payé à 100 pourcent pendant cinq jours, au profit uniquement du nouveau «congé de paternité», il doit renégocier la CCT avec l’association qui l’a signée. Dans l’intervalle, si la CCT n’a pas été renégociée, vous pouvez tenter d’exiger de votre employeur que le congé de paternité soit payé à 100 pourcent (et non à 80 pourcent avec plafonnement) pendant la durée du congé de cinq jours qui est prévu par la CCT. Cette solution serait équitable et défendable.

Dr Valentine Gétaz Kunz, juriste de la section asmac Valais, «Journal asmac» 1/2022

 

Plusieurs modifications de lois qui améliorent la compatibilité entre profession et vie de famille entrent en vigueur en 2021. De quoi s’agit-il?

Pendant longtemps, le législateur suisse n’a pas voulu régler les questions relevant de la conciliation entre activité professionnelle et vie familiale, considérant qu’elles relevaient de la sphère privée. En la matière, l’assurance-maternité, introduite en 2005, a été jusqu’à
aujourd’hui la seule avancée législative notable. Dans de nombreuses conventions collectives, des progrès ont été constatés.

Ces derniers temps, le mouvement législatif s’est toutefois accéléré, sous la pression d’initiatives populaires ou parlementaires. Ainsi, suite à la votation du 27 septembre 2020, un congé paternité de deux semaines est entré en vigueur le 1er janvier 2021. En outre, la loi fédérale sur l’amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches, adoptée le 20 décembre 2019, entraîne l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2021, d’un congé pour la prise en charge de proches, puis, le 1er juillet 2021, d’une réglementation sur le congé de prise en charge d’un enfant gravement atteint dans sa santé.

Enfin, endate du 18 décembre 2020, les Chambres fédérales ont accepté de prolonger la durée du congé maternité et des prestations d’assurance correspondantes en cas d’hospitalisation du nouveau-né; la date d’entrée en vigueur de cette dernièremodification n’est pas encore fixée.

 Vous trouverez tous les détails au sujet des modifications de lois en cliquant ici.

Christian Bruchez, avocat de la section asmac Genève, «Journal asmac» 1/2021

Pourquoi ne peut-on pas faire valoir de travail supplémentaire pendant la grossesse, si l’on travaille plus de 45 heures par semaine?

L’employeur doit occuper les femmes enceintes de telle sorte que leur santé et la santé de l’enfant ne soient pas compromises et aménager leurs conditions de travail en conséquence (art. 35 al. 1 LTr). Les femmes enceintes ne peuvent pas être employées au-delà de la durée ordinaire convenue de la journée de travail, cette durée ne doit en aucun cas excéder neuf heures (art. 60 al. 1 OLT 1).

De mauvaises conditions de travail se répercutent aussi sur l’enfant et peuvent compromettre son bien-être et sa santé. La disposition en matière de protection de la santé mentionnée ne sert pas seulement à protéger la femme enceinte, mais en premier lieu l’enfant à naître. Tout le monde doit donc la respecter. Pas seulement l’employeur et les collègues de travail, mais aussi et surtout les femmes enceintes elles-mêmes, qui doivent faire valoir leurs droits sans condition, dans l’intérêt du bien-être de l’enfant à naître. Dans ce cas, le devoir d’assistance du médecin envers le patient n’est pas un intérêt supérieur. En particulier dans le contexte hospitalier, les collègues de travail peuvent facilement l’assumer. A cela s’ajoute que la plupart des heures de travail supplémentaire ne découlent pas du travail au chevet des patients, mais du travail administratif qui peut toujours attendre ou être délégué.

Le législateur a fixé une limite maximale qui interdit de travailler plus de neuf heures par jour. D’une manière générale, il est donc souhaitable et toujours admis de rester en dessous de cette limite. Il n’est donc pas non plus possible de générer un solde d’heures négatif pendant la grossesse qui serait imputable à la femme enceinte (pendant ou après le congé de maternité). Hélas, il existe de nombreux hôpitaux qui appliquent encore la durée réglementaire de travail de 50 heures par semaine répartie sur cinq jours. Celle-ci correspond à la durée hebdomadaire maximale de travail fixée par la loi sur le travail. Les heures de service des femmes enceintes doivent donc être adaptées et réduites à neuf heures par jour. Même dans des situations exceptionnelles, on ne peut pas exiger des travaux supplémentaires dépassant la limite des neuf heures. Une répartition sur plus de cinq jours serait aussi illicite.

Comment se présente la situation lorsque l’employeur n’exige pas de travail supplémentaire ou seulement de manière indirecte et/ou que la femme enceinte exécute malgré tout, parce qu’elle a mauvaise conscience, les travaux supplémentaires au-delà de la limite des neuf heures? Peut-elle compenser ces heures de travail supplémentaire dans les jours suivants?

La loi ne lui accorde pas de droit à une compensation. Le salaire a été convenu pour une durée de 50 heures par semaine, et non pas pour 45 heures que le législateur prescrit pour protéger les femmes enceintes. Pour un taux d’activité de 100 pourcent, la femme enceinte ne peut générer ni un solde d’heures négatif ni des heures de travail supplémentaire. La situation peut cependant être différente pour un poste à temps partiel, p. ex. pour 50 pourcent répartis sur cinq jours, où il faut aussi tenir compte de la durée maximale de la journée de travail de neuf heures qui n’est jamais atteinte. Il n’est donc pas nécessaire d’adapter l’horaire de service, et les heures de travail peuvent être documentées comme d’habitude. Dans cet exemple, cela s’accompagne d’une inégalité de traitement entre les femmes enceintes travaillant à plein temps et celles travaillant à temps partiel. C’est pourtant défendable, étant donné que la disposition légale concernant la durée maximale de la journée de travail a en premier lieu été émise pour protéger l’enfant à naître.

Les employeurs progressistes ont reconnu la problématique liée à une planification jusqu’à la limite des 50 heures par semaine. Et les problèmes, aussi ceux concernant les collaboratrices enceintes, ont simplement pu être résolus en réduisant la durée réglementaire de travail pour tous les collaborateurs. Certains employeurs qui appliquent encore la semaine de 50 heures sont cependant passés à une saisie du temps de travail séparée pour les femmes enceintes. Dans le meilleur des cas, les soldes d’heures sont «gelés» lorsque la femme se déclare enceinte et réactivés après le congé maternité. Dans l’intervalle s’applique une durée maximale de travail de 45 heures par semaine ou neuf heures par jour. Les supérieurs hiérarchiques obligent même les femmes enceintes à respecter la durée maximale par jour et, si les conditions d’exploitation le permettent, de générer plutôt des heures négatives qui n’ont ensuite aucun impact et peuvent être supprimées. Si une urgence liée à l’exploitation a pour conséquence que la durée maximale de neuf heures est dépassée, ce qui ne peut généralement pas être saisi, la femme enceinte sera autorisée, les jours suivants, à quitter le travail plus tôt ou à générer des heures négatives.

Un autre point important est d’adapter les contenus de travail au taux d’activité réduit des femmes enceintes, au même titre que l’on éliminera au moyen d’une évaluation des risques les travaux pénibles ou dangereux (art. 35 al. 2 LTr).

Susanne Hasse, avocate et directrice de la section asmac Zurich, «Journal asmac» 4/2022

 

Je suis médecin-assistante et j’ai signé un contrat de travail auprès de mon futur em-ployeur. Un mois avant ma prise de fonction, je l’ai informé de ma grossesse. Il a alors résilié le contrat avec pour motif que l’engagement prévu selon le contrat n’était pas possible compte tenu de ma grossesse. Le travail de médecin-assistante étant fatigant et qu’il fallait, en raison de la pénurie de personnel, effectuer des services de nuit d’une durée prolongée. Mon employeur a-t-il le droit de résilier le contrat dans ces circonstances? Que dois-je faire si ce n’est pas le cas?1

L’égalité de la femme et de l’homme est un droit garanti par la Constitution fédérale (art. 8 al. 3 CF). Au fil des dernières décennies, cette égalité des sexes est devenue un sujet important dans les débats politiques. Il s’agit en effet d’établir une réelle égalité des chances dans la vie professionnelle. La loi sur l’égalité (LEg, RS 151.1) entrée en vigueur le 1er janvier 1996 est le résultat de ces débats politiques. Elle vise à empêcher la discrimination fondée sur le sexe dans la vie professionnelle. D’après l’article 1, la loi sur l’égalité a pour but de promouvoir dans les faits l’égalité entre femmes et hommes. L’égalité reste hélas un vœu pieux dans de nombreux secteurs du quotidien (professionnel), ce qui s’illustre par exemple dans les écarts de salaire persistants dans de nombreux domaines. On a voulu y remédier en obligeant, à partir du 1er juillet 2020, les employeurs qui comptent 100 collaboratrices et collaborateurs et plus à réaliser une analyse de l’égalité salariale, de la faire vérifier par un organe indépendant et d’informer les collaboratrices et collaborateurs du résultat. Il s’agit de concrétiser le droit constitutionnel à un salaire égal pour un travail égal ou de valeur égale. D’après l’art. 16 al. 1, la réalisation de l’égalité entre les sexes «dans tous les domaines» et l’élimination de «toute forme de discrimination directe ou indirecte» sont au centre de la LEg.

La LEg s’applique à tous les domaines de la vie professionnelle, de l’engagement en passant par le perfectionnement jusqu’au licenciement, du salaire jusqu’au harcèlement sexuel au travail. D’après l’art. 3 al. 1 LEg, il est interdit de discriminer les travailleurs à raison du sexe, soit directement, soit indirectement, notamment en se fondant sur leur état civil ou leur situation familiale ou, s’agissant de femmes, leur grossesse. Selon l’alinéa 2 de ce même article, l’interdiction de toute discrimination s’applique notamment à l’embauche. Quiconque subit ou risque de subir une discrimination peut, d’après l’art. 5 LEg, requérir le tribunal ou l’autorité administrative. Dans le cas présent, il s’agit d’un licenciement avant la prise de fonction. L’employée peut faire opposition à ce licenciement potentiellement abusif et s’adresser à l’autorité de conciliation compétente. Celle-ci doit alors vérifier si le licenciement prononcé implique une discrimination.

Dans le cas présent, on ne voit pas pourquoi l’employée devrait être inapte à assurer la tâche convenue. De plus, elle aurait pu exécuter son travail jusqu’à deux mois avant la naissance. En effet, jusqu’à cette date, le travail de nuit est expressément autorisé pour les femmes enceintes (art. 35a al. 4 loi sur le travail, LTr). Ensuite, l’employée aurait pu être affectée à une autre tâche ou travailler la journée. La résiliation ne se fonde donc que sur la grossesse annoncée, ce qui relève de l’interdiction de toute discrimination. L’employeur n’est pas en mesure d’avancer des motifs valables pour justifier le licenciement. Il peut au contraire être admis que l’employeur peut remédier à la pénurie de personnel, de manière à respecter la durée maximale autorisée du service de nuit.

Dans le cas présent, il y avait un lien direct entre le licenciement et la grossesse, raison pour laquelle l’employeur a été condamné à verser une indemnité de trois salaires mensuels en vertu de l’interdiction de discrimination selon l’art. 5 LEg. En effet, l’employeur ne peut pas sans autre résilier le contrat. En faisant opposition au licenciement et en s’adressant à l’autorité de conciliation, l’employée peut se défendre avec succès. Si vous êtes victime d’une discrimination fondée sur le sexe, adressez-vous au juriste de votre section asmac. Nous vous aidons volontiers.

1 En référence au cas autorité de conciliation selon la loi sur l’égalité du canton de Zurich, procédure 20/2016 dans: décisions selon la loi sur l’égalité (en allemand), https://www.gleichstellungsgesetz.ch/d103-1778.html (consulté le 26 août 2021).

Samuel Nadig, juriste et directeur de la section asmac Grisons, «Journal asmac» 6/2021

 

J’aimerais bien continuer d’allaiter mon enfant après la fin de mon congé maternité. Quels droits puis-je faire valoir en tant que mère qui allaite?

Les droits des mères qui allaitent qui figurent dans la loi sur le travail et ses ordonnances sont les suivants: 

  • Une femme qui allaite ne peut être occupée sans son consentement. Il est interdit d’employer une mère durant les huit semaines qui suivent l’accouchement. Elle peut avoir recours à un congé maternité d’au total 16 semaines dont seulement 14 sont obligatoirement payées. Jusqu’à la 16e semaine après l’accouchement, elle peut aussi refuser de travailler la nuit (entre 20h et 6h). Son employeur doit, dans la mesure du possible, lui proposer un travail équivalent durant la journée. S’il n’est pas en mesure de le faire, la mère qui allaite peut rester à la maison et touche 80 pourcent de son salaire.
  • L’employeur doit veiller à ce que la santé de son employée et du nouveau-né ne soit pas mise en péril. Les conditions de travail de la mère doivent être adaptées en conséquence à compter de cet instant.
  • Une mère qui allaite n’a pas le droit d’être affectée à des travaux qualifiés de dangereux ou pénibles selon l’analyse de risques. Un poste équivalent mais qui ne présente aucun danger doit lui être proposé. Si cela n’est pas possible, elle a le droit de rester à la maison et de malgré tout toucher son salaire (80 pourcent du salaire, art. 62 et 64 OLT 1).
  • Une mère qui allaite n’a pas le droit de travailler plus de neuf heures par jour, même si son contrat de travail prévoit un plus grand nombre d’heures (art. 60 al. 1 OLT 1). Elle n’a donc pas le droit d’être affectée au service de piquet. La durée réglementaire de travail consignée doit par conséquent être adaptée pendant cette période.
  • Une mère qui allaite doit pouvoir s’allonger et se reposer dans des conditions adéquates (un local de repos doit être installé dans l’entreprise, art. 34 OLT 3).
  • Une mère qui allaite ne doit pas effectuer de travail en équipes qui impose une rotation régulière en sens inverse
    (nuit – soir – matin) ou plus de trois nuits de travail consécutives (art. 14 Ordonnance sur la protection de la maternité).

Pauses d’allaitement rémunérées:
Les mères qui allaitent peuvent disposer des temps nécessaires pour allaiter ou tirer leur lait. Au cours de la première année de la vie de l’enfant (52 semaines), le temps pris pour allaiter ou tirer le lait est comptabilisé comme temps de travail rémunéré dans les limites suivantes:

  • Pour une journée de travail jusqu’à quatre heures: 30 minutes au minimum;
  • Pour une journée de travail de plus de quatre heures: 60 minutes au minimum;
  • Pour une journée de travail de plus de sept heures: 90 minutes au minimum.

Suivant les besoins physiologiques de l’enfant, ces pauses peuvent être prises d’affilée ou de manière répartie. Ces dispositions ne définissent que des temps minimaux qui doivent être comptabilisés comme temps de travail rémunéré. Si la mère doit consacrer plus de temps pour

allaiter l’enfant en raison des besoins physiologiques de ce dernier, elle peut aussi se dispenser d’aller au travail pour une période plus longue (voir aussi l’art. 35a LTr). Sans accord contraire entre l’employeur et l’employée concernée, le temps nécessaire qui dépasse les minimas fixés est comptabilisé comme temps de travail non rémunéré. Une telle convention peut aussi prévoir une réduction de la durée de travail quotidienne.

Indépendamment du fait qu’elle allaite dans l’entreprise ou qu’elle la quitte pour allaiter, l’employée dispose du même temps rémunéré pour allaiter. Cette disposition s’applique aussi pour les femmes qui tirent leur lait.

Important:
Aussi longtemps que vous allaitez, la durée maximale de travail doit être limitée à neuf heures par jour, indépendamment de ce qui a été convenu dans le contrat. De plus, il n’est pas permis d’effectuer des services de piquet. Cela ne vaut cependant que pour la première année après la naissance, c’est-à-dire pendant 52 semaines.

Sandra P. Leemann, juriste des sections asmac Argovie, Soleure, Saint-Gall/Appenzell, Thurgovie et Suisse centrale, «Journal asmac» 4/2021

 

J’ai récemment été invitée à un entretien d’engagement. On m’a alors demandé si j’étais enceinte ou si je prévoyais de fonder une famille dans les mois à venir. De telles questions sont-elles autorisées?

De manière générale, lors d’un entretien d’engagement, l’employeur a le droit de poser des questions sur ce qui est en relation directe et objective avec la prestation de travail à fournir. Tel n’est en principe pas le cas pour les renseignements qui sont du domaine de la sphère privée du candidat ou de la candidate.

Il peut toutefois arriver que l’employeur ait un intérêt légitime à connaître des éléments relevant de la sphère privée du candidat ou de la candidate, car ils ont une incidence sur la relation de travail. Cet intérêt entre ainsi en collision avec l’intérêt du candidat ou de la candidate à la protection de sa personnalité. Tel peut être le cas de l’état de santé, de la grossesse ou encore des antécédents judiciaires. Il y a alors lieu de procéder à une balance des intérêts en présence. Ce n’est que lorsque de l’information dépend la praticabilité de l’exercice de la profession concernée – et non seulement d’éventuelles difficultés mineures – que l’employeur sera légitimé à poser la question et donc à tirer les conséquences de la réponse qui sera donnée.

La condition précitée s’applique bien entendu à des questions en lien avec la grossesse de la candidate, que ce soit sur sa grossesse présente ou sur son intention d’avoir des enfants. De manière générale, et notamment pour ce qui est des médecins-assistantes ou cheffes de clinique, il doit être considéré que poser des questions sur la grossesse – qu’elle soit présente ou future – constitue une atteinte illicite aux droits de la personnalité de la candidate. En effet, quand bien même la grossesse, puis la maternité, ont une incidence sur les rapports de travail (en raison de normes protectrices, puis de l’absence durant le congé de maternité), l’exercice même de l’activité ne sera jamais rendu impossible, sauf situations exceptionnelles de la vie qui peuvent d’ailleurs survenir pour tout un chacun, femmes comme hommes (maladie grave, accident, etc.).

Les seules situations où l’employeur serait légitimé à poser une question en lien avec la grossesse, sont à chercher hors du domaine médical. A titre d’exemple, s’il s’agit d’engager une danseuse pour un spectacle qui doit avoir lieu quelques mois plus tard, il paraît logique qu’un éventuel état de grossesse soit connu de l’employeur potentiel, puisqu’il en va de la capacité ou non d’exécuter le contrat de travail dans son ensemble.

Si la travailleuse est néanmoins confrontée à de telles questions lors de l’entretien d’engagement, comment doit-elle dès lors réagir? Se pose en particulier la question de l’existence ou non d’un «droit de mentir». La question est controversée parmi les commentateurs du droit du travail. Je suis pour ma part d’avis que ce droit de mentir existe pleinement, dans la mesure où il est la réponse à un comportement contraire au droit de la part de l’employeur. Si la travailleuse répond conformément à la vérité à la question illicite qui lui est posée, elle ne sera pas engagée, ce qui ne fera que cautionner l’attitude discriminatoire de l’employeur.

L’on ajoutera, qu’en vertu de la loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes, il est interdit de discriminer les travailleuses notamment en raison de leur grossesse, cette interdiction s’appliquant aussi à l’embauche. C’est dire que si une travailleuse n’était pas engagée, ou encore licenciée durant le temps d’essai où elle n’est pas directement protégée, ceci au motif de sa grossesse, le congé serait jugé abusif, car discriminatoire à raison du sexe.

Après le temps d’essai, la travailleuse est en revanche protégée de manière plus accrue, puisqu’un licenciement signifié pendant la grossesse et durant les 16 semaines suivant l’accouchement serait purement et simplement nul.Il n’en demeure toutefois pas moins que l’employeur aura droit, le moment venu, de connaître l’état de grossesse de son employée, puisque, potentiellement, il devra en tirer des conséquences notamment quant aux normes de protection de la santé des femmes enceintes, ce qui a des incidences organisationnelles. Il appartiendra ainsi à la travailleuse d’informer son employeur ou son futur employeur dans un délai raisonnable, soit aux alentours des trois mois de grossesse. Si vous n’avez pas encore signé le contrat de travail, il est cependant recommandé d’obtenir la confirmation écrite du nouvel engagement avant d’annoncer la grossesse.

Patrick Mangold, juriste de la section asmac Vaud, «Journal asmac» 3/2020

 

Je suis enceinte et travaille à 100 pourcent. Je suis extrêmement fatiguée mais n’ai pas de réelles complications de grossesse. Je souhaiterais rester à la maison quelques jours pour me reposer. Suis-je autorisée à le faire? Est-ce que je recevrai mon salaire pendant cette absence?

De manière générale, l’employeur a un devoir de protection de la santé des femmes enceintes et des mères durant la maternité. Il doit aménager leurs conditions de travail en conséquence (art. 35 de la Loi sur le travail – LTr). Il convient en particulier de rappeler la teneur de l’art. 35a LTr qui traite de l’occupation durant la maternité:

  1. Les femmes enceintes et les mères qui allaitent ne peuvent être occupées sans leur consentement.
  2. Sur simple avis, les femmes enceintes peuvent se dispenser d’aller au travail ou le quitter. Les mères qui allaitent peuvent disposer du temps nécessaire à l’allaitement.
  3. Les accouchées ne peuvent être occupées durant les huit semaines qui suivent l’accouchement ; ensuite, et jusqu’à la seizième semaine, elles ne peuvent l’être que si elles y consentent.
  4. Durant les huit semaines qui précèdent l’accouchement, les femmes enceintes ne peuvent être occupées entre 20 heures et 6 heures.

En résumé, pendant la grossesse, vous pouvez à tout moment vous dispenser d’aller au travail ou le quitter, mais vous devez immédiatement en informer votre responsable. Pour pouvoir prétendre à votre salaire, vous devrez présenter un certificat médical. En général, un certificat médical doit être présenté dès le 3ème jour d’absence, mais cette règle peut varier.

Valentine Gétaz Kunz, avocate de la section asmac Valais, «Journal asmac» 4/2019

Je travaille en tant que médecin-assistante dans un petit hôpital périphérique. Il arrive souvent que je loupe le dernier train lorsque j’assure le service du soir et qu’il dure plus longtemps que prévu. Pour rentrer chez moi, je n’ai alors pas d’autre option que de prendre un taxi, ce qui coûte cher. Dois-je effectivement assumer moi-même ces coûts ou l’employeur doit-il me les rembourser?

S’il faut travailler la nuit, l’article 17e LTr en relation avec l’article 46 OLT1 oblige l’employeur à prendre des mesures supplémentaires appropriées, destinées à la protection des travailleurs, notamment en ce qui concerne la sécurité sur le chemin du travail, l’organisation des transports, les possibilités de se reposer et de s’alimenter, ainsi que la prise en charge des enfants.

Dans la situation décrite plus haut, le médecin est contraint de prendre le taxi pour rentrer chez lui à la fin du service de nuit en raison de l’absence de transports publics. En cas d’absence de moyens de transports publics, l’employeur doit, conformément à l’art. 46 let. b OLT1 assurer la mise à disposition d’un moyen de transport. Une alternative possible aux transports publics serait que l’employeur exploite un minibus, un service de transport parmi les employés ou un service de taxi. L’art. 46 let. a précise également qu’il doit s’agir d’un moyen de transport sûr.

L’employeur doit non seulement mettre un moyen de transport à disposition, mais aussi en assumer les coûts supplémentaires que cela engendre. Comme le travail de nuit présente notamment un avantage pour l’employeur, il serait choquant que l’employé ou l’employée doive assumer ces coûts supplémentaires. Il ne serait pas admissible que l’employeur organise un service de taxi pour le retour à domicile aux frais des employés. L’employeur a cependant le droit d’exiger de la part des employés une contribution aux frais pour les mesures prises en raison du travail de nuit. Ce faisant, il faut toutefois tenir compte de la clé de répartition suivante pour partager les frais entre l’employeur et les employés: les frais de déplacement assumés par les employés pour le travail de nuit ne doivent pas dépasser ceux nécessaires à l’accomplissement du travail de jour.

Conclusion: Vu que d’après l’art. 17e LTr en rel. avec l’art. 46 let. b OLT1, l’employeur est tenu de mettre à disposition un moyen de transport en cas d’absence de transports publics, le médecin peut demander à son employeur de lui rembourser les frais de taxi qui dépassent les frais de trajet habituels.

Sandra P. Leemann, juriste des sections asmac Argovie, Soleure, Saint-Gall/Appenzell, Thurgovie et Suisse centrale, «Journal asmac» 6/2019